Grifith considérait Lucinda en essayant de comprendre que qui n'allait pas. La jeune femme était plutôt fermée, elle qui d'habitude était un parangon d'amabilité et de courtoisie. Mais Grifith s'inquiétait effectivement trop pour en tenir regieur à Lucinda. Elle aussi devait sans doute se faire du soucis pour Declan, sans parler de Suzanna qui devait être au bord de la crise de nerfs. Mais pour l'instant, c'était le sherif qui retenait l'essentiel de l'attention de Grifith. Il souhaitait à part lui que son ami se fut confié à lui avant de déraper de la sorte. Et s'il se refaisait une vie de couple effectivement, alors quelle raison l'avait poussé à reprendre le chemin de la bouteille avant les évênements de cette nuit ?
Grifith était en plein doute, mais pouvait-il remettre en cause le témoignage de la propre soeur de Declan ? A l'évidence non. Et pourtant... Même si Lucinda était la soeur de Declan, elle navigait plus souvent dans l'entourage de Nathaniel et de son influence toxique. Et une part de Grifith voulait se méfier.

" Je comprends votre soucis de protéger Declan, Lucinda. Mais je veux l'aider autant que vous. Et avant de pouvoir faire quelque chose, il faut que je comprenne... " Son regard alla de l'air concerné de Nathaniel à l'air consterné de Lucinda. Visiblement, elle ne savait pas encore que Declan était actuellement en pleine beuverie. " Et une chose notamment. Je peux éventuellement comprendre le dérapage d'aujourd'hui. Mais depuis quand a-t-il recommencé à boire ? Et pourquoi ? Je veux dire... quelle raison aurait-il eu s'il vivait quelque chose d'apparemment positif ? " Il espérait mettre le doigt sur une faille dans un plan machiavélique pour décrédibilliser Declan. Dans quel but ? Aucune idée. Mais il ne voulait pas croire que son ami puisse avoir repris son vice juste pour le plaisir.

Grifith aurait pu éprouver des sentiments partagés au discours de Lucinda. Il aurait pu se sentir idiot de se voiler la face ainsi : bien sur, Declan avait beaucoup de raisons de se lacher, compte tenu des évênements récents. Grifith aurai pu aussi avoir fort sentiment de honte à minimiser ainsi le problème d'alcool de son ami. Bien sur qu'il connaissait la maladie, ses mécanismes, ses rémissions et ses rechutes. Il était évident que Declan n'avait sans doute pas besoin d'encouragement pour reprendre la bouteille en main. Mais une part de lui continuait à nier que le sherif puisse se laisser aller de la sorte. Il aurait donc aussi pu se sentir révolté que la propre famille de Declan l'abandonne de la sorte.

Et en un sens, il l'était, mais de facon totalement disproportionnée. En effet, la pique lancée à son encontre par Lucinda l'avait mis dans un était d'énervement tel qu'il se leva et décida qu'il en avait assez entendu. Après tout, Lucinda avait confirmé le retour à la boisson de son frère, Nathaniel aussi, il en avait des raisons valables. Grifith n'avait plus qu'une seule chose à faire : aller voir Declan sur le champ et lui secouer les puces. Grifith aurait eu du mal à l'avouer, mais la déception commencait à pointer le bout de son nez, et si Declan s'avérait ivre mort, elle serait complète.
Braquant un regard noir à l'heureux couple, il se fendit néanmoins d'un sourire qui se voulait charmant, mais qui était nettement protocolaire.

" Je ne vais pas vous déranger plus longtemps. Je pense que vous avez eu une nuit assez agitée comme cela, et c'était mal venu de ma part de vous ennuyer avec ces questions précisément maintenant. Je vous souhaite une bonne journée. "

Il quitta le salon sans plus de cérémonie. Il avait très envie d'être carrément plus cinglant avec les Redd, mais il sentait que ca n'aurait rien de convenable. Leur balancer qu'ils n'étaient qu'une bande de faux frères ne risquait pas d'arranger les affaires de Declan et les siennes.
Il ignorait s'il avait Nathaniel sur les talons - Lucinda ne prendrait sans doute pas la peine de le raccompagner - mais il s'en fichait. Il voulait juste sortir de cette maison.

Très honnêtement – et Nathaniel ne le disait pas uniquement par pur méchanceté, c’était un constat – il n’était pas aidé. Aucun membre de la famille Spelling n’était vraiment très fin et ils avaient tous l’air, à un moment ou un autre de la journée, d’être des foutus carpes sorties de leur marre. De parfaites tronches d’innocents… Et ça n’était pas un compliment dans la bouche du garagiste.

Grifith aussi était un parfait prototype de l’idiot du village. Bon vivant, un humour potache, une gueule de gentil, serviable à la limite de la carpette… Non vraiment, il était parfait ! Parfaitement à gerber aussi.
Nath l’avait suivi dans l’entrée, secondé par une Lucinda toujours furibonde qui l’excitait presque. Le garagiste avait déjà prévu de faire un petit bout de chemin avec celui qui avait été leur invité durant quelques intenses minutes, histoire de lui resservir une portion de bons sentiments mielleux. Il en aurait profité pour lui demander d’excuser l’attitude grossière de sa femme, dépassée par les évènements et blablabla.

Mais cette petite conne de Suzanna était apparue au bas des escaliers avec son petit bobo. N’était-elle donc pas capable de s’autogérer pendant plus d’une minute sans causer de drames ? Elle avait encore les larmes aux yeux et l’air totalement minable avec son papier hygiénique sur le doigt.
Et évidemment, Lucinda s’était précipitée…

« Quoi ? Fais-moi voir ! Viens dans la cuisine »

Et en deux temps trois mouvements, elle l’avait embarquée à sa suite, les laissant, Grifith et lui, seuls dans l’entrée. Ils s’entreregardèrent sans l’atmosphère un peu plus alourdi par cet énième rebondissement foireux…

« Moi non plus je n’ai jamais eu à élever d’adolescente et…elles n’écartaient pas leurs cuisses pour moi à cette période alors, je suis totalement largué et je n’ai aucune idée de ce qui m’attends ou de comment je vais gérer les choses » lâcha-t-il tranquillement « Lucy et moi caressons l’idée de devenir parents sans succès depuis des années... Je ne sais même pas comment j’aurai géré la petite crise qui a lieu en ce moment-même dans la cuisine et il ne s’agit que d’une banale coupure… Vous ne connaitriez pas une de ces formules magiques censé arrêter les saignements ou calmer les brûlures ? Ma grand-mère savait faire ce genre de choses… Elle était un peu médium vous le saviez ? Certains pensaient même qu’elle lisait dans les pensées ! …Une affreuse bonne femme ma grand-mère, paix à son âme ! Quelques jours après sa mort, des jeunes ont gravés le mot ‘sorcière’ sur sa pierre tombale. Je crois que Declan faisaient partie de ceux-là » poursuivit Nathaniel, espérant mettre son interlocuteur mal à l’aise « Enfin bref, j’ai bien peur de ne pas être à la hauteur dans le rôle de père de substitution et je ne sais absolument pas pourquoi je vous retiens pour vous confier tout ça… Peut-être qu’il m’a semblé que vous étiez proche de Suzie et que j’espérai… enfin, laissez tomber » soupira-t-il en chassant ses remarques d’un geste négligé de la main

Aah, rien ne valait une bonne discussion sur la jeunesse et ses mystères entre hommes civilisés !

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PS : Lili, tu peux choisir de faire partir Grifith ou profiter de ce sujet pour questionner un peu Suzanna. Il faudra refaire un sujet un peu plu tard si tu préfères rester sur l'idée qu'il aille directement interroger Declan ^^

[HRP : de toute facon, il va aller voir Declan en sortant de chez Nath et Lucy ]

Le bruit de Suzanna descendant l'escalier le doigt en sang arrêta Grifith dans sa lancée. Il fit un geste pour voir ce qu'il en était, mais il fut arrêté par le dédain flagrant de Suzanna qui prit un soin tout particulier à l'ignorer. Bon en même temps, pour le coup, ce n'était qu'une petite coupure, elle ne risquait sans doute pas de perdre son bras. Il la suivit néanmoins du regard, avec l'envie de la suivre et de la rassurer sur son père : peu importe avec qui il partageait sa vie - en ce moment ou pour une longue durée - il ne doutait pas une minute que sa fille soit au centre de ses préoccupations. Mais ce n'était sans doute pas le moment.

Il entendit le petit monologue de Nathaniel, qui eut pour résultat de l'irriter à nouveau. Ces histoires de coucherie le rendaient dingue. Il laissa néanmoins le garagiste terminé.

" Même en supposant que les accusations contre moi de votre épouse soient fondées - et il faut avoir une imagination sacrément débordante pour ca - ca ne renseigne en rien sur la facon d'élever un enfant, fusse-t-il un adolescent, à mon avis. Surtout quand on ne s'en est pas occupé depuis sa naissance, et avec l'histoire particulière de Suzy. C'est chez son père qu'elle trouvera ces réponses-là. " il jeta un regard noir à Nathaniel. Pour un peu, il accuserait le garagiste - et sa femme - de ne pas faire vraiment d'effort pour convaincre Suzanna que Declan n'a rien fait de mal, et au contraire, tout faire pour lui monter le bourrichon contre lui.
La mention de Grand-mère Redd et de sa tombe le fit tiquer, mais encore une fois, il nota que Nathaniel avait l'accusation facile, quand il s'agissait du sherif. Cette dernière supposition l'incita à revenir sur son départ avancé. Et éventuellement, la part gentille et naïve de lui-même décréta que si Nathaniel était sincère - après tout, pourquoi pas - il semblait en détresse et vraiment désireux de venir en aide à sa nièce. Il soupira donc intérieurement et désigna la cuisine de la tête.
" Néanmoins, si ca peut vous aider, je peux toujours essayer de lui parler. On se connait depuis longtemps, je n'aurai peut être pas le même impact que vous... "

Il guetta la réponse de Nathaniel. Même si ca lui faisait mal de le reconnaitre, pour le coup, le garagiste était le mieux placé pour connaitre l'état d'esprit de la jeune fille.

Grifith grimaca un " what the fuck ?!! " dans le dos de Nathaniel. Suzanna ?? Avoir le béguin pour LUI ?! Nan mais ca va pas ?!! Il s'était plutôt toujours considéré comme un grand frère, un protecteur éventuellement. Certainement pas comme... il ne voulait même pas y penser tiens ! Ca lui semblait aussi incongru que de s'imaginer embrassant Nathaniel - quelle horreur...

Cependant quand il emboita le pas au garagiste pour le suivre dans la cuisine, il se recomposa une mine de circonstance. Mais de quelle circonstance ? A voir Nathaniel, Lucy et Suzanna, on pourrait imaginer que Declan venait de découvrir qu'il venait de choper le cancer. C'était tellement rare à Grayson que la plupart des habitants étaient persuadés que c'était pire que la lèpre... Pour les circonstances étaient moins dramatiques que cela, pour ce qui concernait Declan. Qu'elles génèrent un choc, oui... Mais de là à se comporter comme s'il était mourrant...
Alors quoi ? Grifith ne voulait pas croire à la rechute de Declan sur les seuls dires de Nathaniel et son épouse. Il en aurait le coeur net chez son ami, mais en attendant, il ne voulait pas y voir une raison de l'envoyer ad patres.
Restait la détresse évidente de de Suzanna. Mais la miss ne faisait-elle pas un peu trop la drama queen ? Peut être était-ce la carte à jouer... Le grand frère qui charie parce qu'elle en fait des tonnes pour pas grand chose ?

Il fut tiré de ses pensées par Lucinda qui l'interpella d'un ton peu amène. D'un air emprunté, il s'exécuta, tendant les ciseaux à la maitresse de maison et la regarda découper le pansement, renfrognée. Il chercha ses mots un instant.

" Je crois qu'il va falloir amputer... " Au vu de la tête de Suzanna, ce n'était pas difficile d'imaginer que le doigt était effectivement prêt à tomber même de lui-même.
Pourtant, il prit mine de rien son air de lutin, sans vraiment sourire, mais avec une lueur taquine au fond des yeux en cherchant le regard de Suzanna. En espérant que ca lui fasse un peu retomber la pression.

Les sourcils levés, Grifith avait attendu la réaction de Suzanna, qui arriva effectivement, sous forme d'un pauvre sourire.

" Ah nonon, c'est l'expert médical qui parle... " Le sourire de Grifith s'élargit à sa propre betise, avant de reprendre un air un peu plus sérieux. Il essayait d'ignorer Nathaniel dans l'encadrement de la porte et son air d'oncle soucieux, et plus encore les coups d'oeil inquisiteurs de Lucinda décidée à protéger sa nièce du pervers qu'il était. Enfin... Qu'elle pensait qu'il était, parce que soyons francs, il n'était pas un pervers quand même...

Il haussa les épaules en réponse à sa question.
" Je n'ai pas parlé de te ramener. Quoiqu'il doit s'inquiéter pour toi, et ca le rassurerait de te savoir à la maison, je pense. Tu sais qu'il s'inquiète toujours pour toi, non ? " Il pinca les lèvres. Les yeux baissés, il cherchait ses mots, autant pour désamorcer la colère de Suzanna que pour calmer la sienne. " Tu sais... Je comprends ton point de vue. Et pour parler franchement, je le partage un peu... Mais... "

Il se disait que les histoires de coucherie en douce, en ce moment, n'apportaient rien de bon, à personne. Il pensait à sa propre histoire avec Colleen qui tournait plus que mal. Et maintenant Declan... Mais pouvait-on lui en vouloir d'avoir voulu attendre le bon moment pour en parler à sa fille, et à ses amis ? Grifith devait bien admettre que non.

" Je crois qu'on devrait admettre une chose : s'il ne nous en n'a pas parlé avant, c'est peut être parce que ce n'était rien, au départ. Et quand c'est devenu plus... Il n'a peut être pas su quoi ni comment le dire... " Nouveau haussement d'épaule. " Il a toujours voulu faire au mieux pour toi. Même s'il est pas très doué... " Il laissa un silence avant de conclure. " C'est pas le moment, je sais. Mais si tu veux... enfin, tu sais que si tu as besoin de parler... je suis là. "

Il croisait juste les doigts mentalement pour que ca ne relance pas la verve de Suzanna, la guettant avec son air trop mignon qui faisait craquer toutes les mémés du quartier.

Grifith hocha la tête avec un demi sourire, plus ou moins rassuré. Le fait de savoir que finalement, Suzanna n'était pas dans une rage si noire que ca, et que les choses pourraient éventuellement s'arranger entre elle et son père, ramenait un peu de sérénité chez l'adjoint du shérif. Il résistait à la petite voix qui réclamait l'identité de la maitresse de son meilleur ami. A la place, l'association de temps pour digérer et de snobbage amena une image à Grifith qui lui élargit le sourire, et qui pour le coup ne pouvait rester derrière ses lèvres.

" Tu peux toujours lui demander de rester dans une caisse sans parler pendant 5 h pour te prouver à quel point il regrette... " Il ne put retenir un gloussement à la limite du ridicule, d'autant plus pathétique qu'il réalisa que sa vanne tomberait sans doute à plat : Friends était une série culte pour sa génération, mais Suzanna ne saisirait sans doute pas l'allusion. Encore moins Lucinda et Nathaniel, qui allait sans doute le prendre pour encore plus taré qu'ils ne le pensaient déja. Surtout Lucy, il l'aurait parié. Il plissa donc les lèvres et marmonna un "désolé" dans son absence de barbe.

" Non c'était... " Il poussa un soupir dépité. Evidemment qu'elle n'avait pas compris. " Laisse tomber. "

Il regarda Suzanna, cherchant un truc intelligent à dire, mais rien ne venait. Il aurait aussi pu lui demander si elle n'avait pas remarqué des choses étranges chez son père, le fait qu'il boive à nouveau. Mais Declan avait toujours préservé sa fille de ce genre de choses. Elle ne risquait donc pas de l'éclairer davantage. Et puis la santé de son père était sans aucun doute le cadet de ses soucis à ce moment précis.

Il se contenta donc de hocher la tête, et après avoir jeté un coup d'oeil à Nathaniel et son air mièvre, ainsi qu'à Lucinda dont l'hostilité transpirait par tous les pores de sa peau, il revint à Suzanna.

" Ne prend pas de décision définitive, tu sais... Ca peut changer, d'ici là. En attendant, tu sais que la porte est ouverte chez moi aussi... Repose toi bien. "

Il salua Lucinda d'un signe de tête avant de reprendre la direction de la porte d'entrée - de sortie en l'occurence - prêt à prendre congé.