Jeanne était dans sa voiture, en route pour Grayson. Elle venait de terminer sa journée de travail un peu plus tôt que d'habitude. Son dernier patient avait décidé de ne pas venir, prenant comme excuse une urgence familiale. Elle savait pertinemment que venant de ce gars là ça devait être une excuse bidon pour ne pas suivre sa thérapie. Mais elle ne pouvait pas aller le chercher par la peau des fesses, l'asseoir dans son bureau et l'obliger à parler. Donc, comme elle n'avait plus rien eu à faire, elle rentrait chez elle ! Elle stoppa sa voiture au feu rouge d'une intersection, réfléchissant à ce qu'elle pourrait bien faire. Sa maison était vide, personne ne l'y attendait... Elle pourrait peut être rendre visite à une amie, ou aller boire un verre au drugstore... Des idées alléchantes quand elle se rappela de ce qu'elle avait entendu en ville. Il semblerait que Calvin, le gérant de l'établissement, ait encore ouvert un peu trop sa grande gueule et ait fini en taule cette fois-ci ! Ce gars a un sale caractère, rien d'étonnant qu'il ait ce genre de problème... Malgré ça, Jeanne appréciait l'homme. Elle ne passerait pas des heures en sa compagnie, mais quand elle passait boire un verre dans ce qui lui servait de bar, elle lui adressait quelques mots. Rien de très excitant, quoique parfois, l'homme pouvait se montrer très intéressant. Ce qui amenait la brune à parfois flirter avec lui, histoire de voir jusqu'où il pouvait aller.
Le feu devant elle passa au vert, et elle continua son chemin. Elle avait bien envie de passer au poste de police voir comment il allait. Il allait sûrement bien le connaissant, mais l'idée de voir Calvin derrière les barreaux lui mit le sourire aux lèvres. Rien que pour cette vision, Jeanne décida de faire un détour par le bureau du shérif !
Le reste du trajet ne fut pas long, et elle trouva rapidement une place où garer sa voiture. Elle prit une minute pour se regarder dans le rétroviseur intérieur, vérifier sa tête pour paraître à son avantage. La brune releva ses cheveux en un chignon plus ou moins bien fait. Elle sortit de la voiture, arrangea sa jupe et se dirigea vers la porte d'entrée du poste. Une fois à l'intérieur, elle informa Kathleen, à l'accueil, l'objet de sa visite. A peine quelques minutes plus tard, elle était devant Calvin.

T'as pas encore su la fermer alors ? 

Calvin eut l'air surpris de voir Jeanne lui rendre visite. En même temps, il aurait eut l'air surpris si quiconque était venu à sa place. L'homme était un drôle d'oiseau, et il n'avait pas beaucoup d'amis en ville... La jeune femme ne savait pas si elle comptait comme tel, mais en tout cas, elle avait bien fait de faire un détour par le poste. Elle voyait le gérant du drugstore dans un état assez pitoyable, mal rasé, et il avait les signes d'une bagarre sur son visage.

Je vais bien. En tout cas j'ai meilleure mine que toi !

lui répondit-elle avec un sourire. Mais elle n'eut pas le temps d'ajouter quoi que ce soit, que l'homme décida de se donner en spectacle. Jeanne se retourna à moitié pour voir l'adolescent dans la cellule en face commencer à frapper sur un tabouret en rythme. Elle se retourna vers Calvin quand celui-ci entonna la chanson de Bob Marley, I shot the sherrif. Il avait l'air de bien s'amuser de la situation. Mais elle n'en attendait pas moins de sa part. Une fois leur « concert » improvisé fini, elle sourit et dit :

Tout à fait approprié à la situation, Calvin. Mais je ne suis pas sure que le shérif soit tout à fait dans le même ton que toi...

Jeanne ne savait pas en détail ce qui s'était passé lors de la réunion improvisée au drugstore, mais si Calvin était là c'était sûrement pour une bonne raison... Elle avança de quelques pas en direction des barreaux de la cellule, et appuya une de ses mains dessus. Elle afficha un sourire narquois sur son visage avant de dire, dans presque un murmure :

En tout cas, je dois avouer que te voir derrière les barreaux est assez amusant !

Calvin était bien toujours le même, toujours aussi provocateur. Même derrière les barreaux il jouait son petit jeu, flirtant plus ou moins avec elle. Depuis que Jeanne connaissait l'homme, il avait toujours été comme ça. Cela ne la dérangeait nullement, elle pouvait très bien entrer elle même dans ce petit jeu. Malgré tout elle n'avait jamais été plus loin que les paroles.

C'est assez amusant oui. C'est comme si tu étais attaché, tu sais... Je pourrais faire n'importe quoi, tu ne peux pas t'approcher...

Elle garda le silence, le laissant imaginer un tas de choses dans sa petite tête. C'était le moins qu'elle pouvait faire. Calvin aurait été le seul prisonnier, elle aurait poussé son idée plus loin. Seulement il y avait deux autres gars, deux autres spectateurs. Elle ne ferait donc rien. Dommage, elle trouvait l'idée excitante...
Elle était assez proche de Calvin, maintenant que celui-ci s'était rapproché des barreaux. Quand il évoqua sa robe, elle se rapprocha encore plus. L'espace entre les deux était mince. Il y avait seulement les barreaux de la cellule pour les séparer. Et dans un murmure elle lui répondit :

Peut être bien, mais ça c'est une chose que tu ne pourras pas savoir !

Un sourire malicieux s'afficha sur son visage et elle recula son visage de quelques centimètres.

Calvin continuait son petit jeu. Peu à peu il se montrait sous la facette qu'elle connaissait le mieux de lui : son coté dragueur. Il avait toujours eu cette attitude envers elle, et parfois elle se demandait ce que cela cachait. Elle se glissait alors dans son rôle de femme aguicheuse. Elle savait jouer de ses charmes, et avait déjà mis quelques hommes, autres que son mari, dans son lit. Bizarrement, jamais elle n'envisageait de faire de même avec le gérant du drugstore. Elle avait déjà bien assez d'homme à gérer comme cela. Et puis elle le voyait plus comme une énigme à déchiffrer. Bien sur il lui arrivait parfois de perdre cela de vue, et elle se laissait embarquer par Calvin. Il la menait alors sur des terrains accidentés qui pouvaient la mener n'importe où... Il fallait donc qu'elle se montre prudente, car l'homme lui ne semblait pas se soucier de ce qui pouvait arriver. Et d'ailleurs, elle ne savait même pas où il voulait aller !

Il faut savoir garder une part de mystère, sinon ça serait moins amusant !

Pour faire un bon rôti il faut le laisser mariner dans son jus pensa-t-elle. Il fallait bien laisser son imagination marcher un peu. Et puis, si elle cédait, elle devrait trouver quelqu'un d'autre pour jouer à ce petit jeu. Et bien qu'il y ait quelques mâles alléchants dans le coin, elle devait se montrer prudente. Elle était mariée. Parfois il lui arrivait de l'oublier, mais si tout les hommes qu'elle croisait finissait dans son lit, son mari finirait par le savoir. Et franchement, elle ne savait pas trop comment il réagirait... Quand elle l'avait connu il était attentionné et aussi doux qu'un agneau, mais depuis leur arrivée à Grayson, il avait changé. Il était indifférent maintenant, et parfois même il lui arrivait de piquer des colères. Il avait cassé une assiette une fois. Mais jamais il n'avait levé la main vers elle. Elle ne le connaissait plus. Elle avait bien tenté de le faire parler, histoire d'en savoir un peu plus, mais il ne lui parlait plus. Enfin ils n'avaient pas vraiment de conversation sérieuse tout les deux. Il préférait s'en aller on-ne-sait-où... Fuir les conflits sans doute, ou se cacher. Bref, maintenant, elle en était réduite à passer au poste de police pour s'émoustiller un peu. Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle même était devenue non plus... Jamais elle n'aurait imaginé finir en femme adultère, passant au poste de police voir un autre homme que son mari. Mais elle n'y pensa plus quand elle continua :

Et bien essaie, on verra bien ce qui peut se passer !

Oserai-t-il ou pas ? Elle était assez proche pour qu'il la touche, mais elle n'avait pas encore décidé si elle se laisserait faire ou pas... De toute façon, ça n'irait pas bien loin avec les deux autres détenus à coté, et les policiers qui étaient une pièce à coté. Elle voulait mettre un peu de piment dans sa vie, mais la y'en avait peut être un peu trop, elle allait finir par se brûler la bouche !