Non mais pour qui est-ce qu’elle se prenait au juste ? Pour le moment et jusqu’à preuve du contraire, elle n’était que la petite amie d’Isaac pour eux ! Et encore plus pour lui qui n’avait jamais eu le temps d’apprendre à la connaître. Certes, elle attendait ses enfants et ils seraient vite mariés, mais pour l’instant, ce n’était pas le cas et Aahron détestait le ton condescendant qu’elle employait avec lui.
Si un de ses frères n’avaient tenu ne serait-ce qu’un quart du discours accusateur et perfide qu’elle venait de sortir, il se serait déjà ramassé son poing sur le coin de la figure. Et il n’avait pas besoin de croiser leur regard pour savoir qu’ils en avaient conscience. La tension était palpable dans la petite cuisine.
Mais Allie était une fille. Une fille enceinte en prime. Il ne lèverait donc jamais la main sur elle et, si l’idée le traversa de se venger sur Isaac en le cognant, il n’en fit rien.
De toute façon, à présent, il était plus écoeuré que réellement en colère. De quel droit se permettait-elle de le juger de cette manière ?
Où il était quand tout ça était arrivé ? Qu’elle essaie avec sa famille ! Avec son fils de 7 ans qui ne comprenait même pas vraiment ce que signifiait « être mort » et réclamait ses grands parents toutes les nuits. Il ne dormait pas avec Aidan parce qu’il était trop occupé à veiller son fils. Il n’avait pas prit Aidan chez lui parce que c’était à Isaac que Sean et Margaret l’avaient confié au moment de leur départ.
Quand à le voir pleurer, étant donné le caractère à fleur de peau de son jeune frère, il l’avait certainement vu plus de fois qu’Allie. Il l’avait même entendu pousser ses premiers cris à la maternité alors qu’il se débattait dans ses bras où Margaret l’avait déposé.
Pouvait-elle en dire autant ? Elle n’avait aucune idée de quoi elle parlait.
Elle agissait de manière aussi bête que méchante. Il avait plus de carte qu’elle en main et de bonnes intentions. Peut-être qu’elle était vexée de ne pas avoir été conviée, mais ce n’était sûrement pas une raison pour l’attaquer comme elle le faisait.
Ils étaient là pour Aidan, pas pour Madame ! Tout ce qu’elle voulait, c’était ce mêlé à leur réunion, sans même vraiment se soucier de son thème !
Du moins, c’était ce qu’il en pensait.

Alors qu’il allait le lui signifier et demander à la troupe de se recentrer sur la raison qui l’avait poussé à organiser cette petite réunion, Samuel prit justement la parole.
Son ainé lui jeta un regard coléreux. C’était sa réplique. Qu’est-ce qu’ils avaient tous à le faire passer pour un débile hargneux ?
Et Isaac en remis une couche en prenant son air pompeux et supérieur habituel qui le faisait se sentir comme…comme un manuel plutôt que comme un intellectuel.

Prenant sur lui, Aahron arracha son regard brillant des yeux chargé d’animosité d’Allie.
Il n’en resterait pas là et comptait bien rendre coup pour coup, mais comme Samuel l’avait gentiment fait remarquer : ils n’étaient pas là pour se prendre la tête.
Il allait donc falloir qu’il mette son ressentiment de côté pour se concentrer sur l’essentiel. Sur Aidan.
Le trentenaire pris donc une grande inspiration et décida qu’à partir de maintenant, pour plus de sureté, il n’adresserait plus aucun regard à la femme enceinte et agirait comme si elle n’était pas venue.
De là à faire la paix ?

« J’ai plus cinq ans, Isaac. Et permets-moi de te rappeler que quand c’était le cas, tu salissait encore tes couches » répliqua-t-il, cinglant

Ne laissant à quiconque l’occasion de lui prendre la parole et de relancer le débat, Aahron enchaina, luttant contre lui-même pour garder un ton impassible et se concentrer sur ce qu’il avait à dire.

« Bon, aux dernières nouvelles et d’après Aidan lui-même, depuis qu’Allie lui a filé ses somnifères –ce qu’entre nous je ne cautionne pas- il vit à DisneyLand. Plus de cauchemars, tout va bien dans le meilleur des mondes, son job est comme ça » fit-il en levant les deux pouces comme Aidan le faisait parfois dans un clin d’œil « ses nuits sont reposantes à souhait et Mickey est son meilleur ami… Une version officielle bien peu crédible évidemment et ce petit crétin est sûrement persuadé que son mensonge à pris »

Aahron se retourna ensuite vers l’un des placards du bas et l’ouvrit pour en sortir les éléments qu’il avait rassemblés après le départ d’Aidan. Deux bouteilles de Vodka, un paquet de marshmallow vide, un pot de beurre de cacahuète quasiment vide, des oreo et du miel.
Il déposa le tout au centre de la table et observa Isaac puis Samuel, niant ouvertement Allie.

« J’ai retrouvé ça dans le débarras. On est d’accord qu’il n’y a qu’Aidan pour avaler ce genre de saloperies… En parlant de ça, Sammy, à partir de maintenant, j’aimerai que tu arrêtes de lui acheter des bouteilles et dis à Charlie de plus lui en vendre si jamais elle le faisait » lâcha-t-il brièvement avant de reprendre « J’ai été chercher ça ce matin mais ça y traine depuis un moment. J’vais pas vous mentir, ça fait un moment que je… mène l’enquête dirons-nous et j’ai déjà… Bon, pour faire simple. J’avais des doutes sur le sommeil d’Aidan » soupira-t-il en essayant de se remémorer le plan qu’il avait fait pour ne pas avoir l’air trop stupide, en vain. Ca avait toujours l’air si simple quand Trisha répétait ses plaidoiries devant lui pourtant… « Y a une semaine, j’ai été réveillé par le réveil de son portable et j’me suis rendu compte qu’il sonnait pas dans votre chambre mais dans l’débarras. J’l’ai entendu changer de pièce et puis son portable à sonner à nouveau cinq minute après, dans la chambre cette fois » expliqua Aahron en s’adressant à Samuel « Après ça, il a fait comme s’il venait de se lever et est allé prendre sa douche. Je suppose qu’il attend que tu te sois endormi pour se tirer et aller se planquer dans l’autre pièce et s’arrange pour revenir avant que tu te lèves. Et puisque tu es loin de te lever aux aurores et qu'on pourrait faire péter un obus à côté de ton lit sans te réveiller… c’est assez simple » conclut-il avant de s’adresser au restant de groupe (faisant mine de ne pas voir Allie) « J’en suis pas resté là et j’ai voulu vérifier mon hypothèse, même si au fond, j’avais pas franchement besoin de le faire… J’ai remplacé les somnifères par des médicaments… contre les douleurs, que j’ai trouvés dans la boîte à pharmacie. Je me suis dis qu’avec…enfin comme Allie était enceinte, elle n’avait plus besoin de ça » bafouilla-t-il en se sentant rougir malgré lui « Enfin bref, j’les ai remplacé et Aidan n’y a vu que du feu. Pourtant ils n’ont ni al même forme, ni le même effet sur l’organisme. D’après Sam, le petit a tout de même assuré qu’il avait bien dormi et pris ses cachets… En gros : il se fou de notre gueule » conclut le plus vieux dans un soupir

L’ainé de la fratrie écouta les remarques des autres, se félicitant finalement d’avoir organisée cette petite entrevue. Même si elle ne s’était pas exactement déroulée selon son plan, il était satisfait de constater que tous prenaient cette affaire à cœur. Allie comprise, bien évidemment. Il ne doutait pas qu’elle appréciait Aidan et savait qu’elle avait été d’une grande aide pour les trois autres. Mais de son point de vue, elle continuait à ne pas avoir sa place ici. Pas dans leur famille, mais dans cette conversation entre frères. Quelle serait la prochaine étape ? Elle se pointerait à l’enterrement de vie de garçon d’Isaac avec une moustache pour le surveiller ?
Aahron chassa ces pensées pour se concentrer sur le présent.

« Je ne suis pas certain… Enfin… » se reprit Aahron, tiquant d’agacement « J’aime pas l’idée de penser que quelque chose cloche chez lui »

Bien entendu, il avait déjà envisagé la chose. Il s’était quelque fois demander si, comme le craignait Aidan lui-même, il n’était pas en train de devenir fou… Et cette idée le répugnait et le faisait se sentir affreusement coupable.
Son jeune frère avait toujours été un peu… à part. Un peu dans son monde. Il y avait notamment eu une période pendant laquelle ce fait avait été clairement révélé. Une période qu’ils avaient tous essayé d’oublier et qu’aucun d’eux n’avait jamais plus évoquée.

A l’époque, Aidan allait avoir 5 ans et lui-même en avait 17. C’était juste avant son départ de la maison, pendant l’été. Cette année-là, Margaret et Sean avaient décidé de faire quelques travaux dans leur maison et les garçons avaient enfin pu obtenir des chambres séparées. Chambre dont Aahron n’avait profité que quelques mois. Ils avaient passés tout l’été à travailler et l’adolescent qu’il était s’était découvert une véritable passion pour le bâtiment. Et pendant qu’ils bricolaient avec leur père et leur oncle, Margaret trainait Aidan dans un tas de brocantes pour repérer toute sorte de meubles qu’ils étaient chargés de déménager tour à tour.
Au début, ils avaient pensé que c’était le manque d’attention qu’on lui portait qui avait modifié le comportement d’Aidan. Il dormait peu et cauchemardait beaucoup, pleurnichait fréquemment sans raison apparente, réclamait sans cesse les bras de Margaret, refusait de pénétrer dans sa nouvelle chambre et avait tenté plusieurs fois de s’échapper de la maison.
Et puis un beau jour, il avait arrêté de pleurer mais ça n’avait rassuré personne, au contraire. Il passait alors le plus clair de son temps prostré dans sa chambre où il avait fini par rentrer, simplement assis sur le petit siège à bascule que Margaret lui avait trouvé sur l’une des brocantes. Il se balançait, le regard vide, le teint pâle. Et après quelques jours, quand leur mère s’était vraiment inquiétée et avait voulu l’emmener chez le médecin, il avait hurlé comme un possédé en s’accrochant à son fauteuil. Aahron revoyait encore sa mère tenter de le raisonner. Et il se souvenait surtout de ce qu’Aidan avait finit par faire.
Il l’avait giflée, sèchement, son regard étrange plongé dans le sien. Un regard inquiétant et tellement chargé de colère que pendant un instant, Aahron avait imaginé que les yeux bleus de son cadet étaient devenus noirs.
Il l’avait giflée puis avait retroussées ses lèvres à la manière d’un animal pour lui montrer les dents, grognant férocement. Et puis ses yeux avaient roulés dans leur orbite et il s’était effondré.
Ils avaient passé le restant de la journée à l’hôpital et les nouvelles n’avaient pas été bonnes. Aahron ne se souvenait pas vraiment de ce qu’ils lui avaient inventé comme maladie, mais il y avait une histoire de malnutrition et de déshydratation que personne n’avait vraiment compris.
Leur frère était resté un moment à l’hôpital et eux, avaient été envoyé en vacances avec leur oncle.
Aahron avait été révolté par la décision de ses parents de l’éloigner, mais il avait finit par se raisonner. Samuel et Isaac avaient besoin de lui. Ca avait été les pires vacances de sa vie. Peut-être même pire que l’été qu’il passait en ce moment à Grayson.
Il avait fini par se persuader que, lorsqu’ils rentreraient, leurs parents leur annonceraient qu’Aidan était mort, qu’ils avaient été éloignés pour ne pas avoir à vivre ses derniers instants.
Mais quand ils étaient rentrés, Aidan avait couru dans leur bras comme si rien ne s’était passé, un large sourire aux lèvres. Et la vie avait reprit son cours. Ils n’avaient jamais vraiment terminés les travaux cette année-là et personne n’en avait rien eu à faire. En réalité, ils avaient même passé la nuit de leur retour dans la même chambre tous les quatre…

« Il n’est pas fou. J’dis pas que c’est ce que vous essayé de dire mais… C’est comme ça qu’il le verra » reprit-il en s’arrachant difficilement à ses souvenirs « Il est aussi flippé que nous. Tu as bien vu comment il a réagit la dernière fois. Tu veux vraiment prendre ce risque, Isaac ? » demanda-t-il en plongeant son regard dans celui de son frère « Si c’est ce que tu veux faire, ce que vous voulez tous faire… alors je vous suis. Mais ça ne va pas être facile, vous savez comme moi qu’il a horreur des hôpitaux. Tu penses vraiment que tu saurais le convaincre, Sammy ? Parce qu’on aura pas trente-six chances… »

Aahron était soulagé de constater qu’au moins une autre personne que lui n’approuvait pas cette idée de faire subir des tests à Aidan. Il se montrait souvent buté lorsque les choses n’allaient pas dans son sens (même en sachant qu’il avait tort) et il craignait que sa rancune passagère vis-à-vis d’Isaac et son manque de volonté face à sa fiancé enceinte n’obscurcisse son jugement. Mais non, l’idée était décidément bancale.
Mais alors qu’il allait rebondir sur le sujet, Allie avait de nouveau reprit la parole pour finalement se rétracter. Alors que le trentenaire se serait contenté d’enchainer, Sam, lui, chercha à la forcer à parler.
Isaac et lui accordèrent donc toute leur attention à la jeune métisse (le médecin plus que lui qui affichait à présent un air blasé) pour écouter ce qu’elle avait à dire.
Mais alors qu’elle allait ouvrir la bouche, un bruit horriblement familier attira leur attention à tous…

Dans l’entrée en effet, la porte venait de s’ouvrir sans douceur pour venir cogner le mur. L’ainé des Donnelly eut juste le temps d’échanger un regard interloqué avec Isaac avant que la porte ne soit cette fois sèchement claquée. Tout s’était passé très vite et aucun d’eux n’avait pu réagir d’une quelconque manière que ce soit.
La seconde suivante, alors que leurs yeux étaient à nouveau braqués en direction de l’entrée, la silhouette familière d’Aidan leur apparut. Le benjamin de la fratrie se dirigea d’un pas pressé vers l’escalier faisant face au hall mais, alors qu’il allait les grimper d’un pas furieux, il se figea soudain. A n’en pas douter, il les avait aperçut du coin de l’œil, tous installés autour de la table de la cuisine, vraisemblablement en plein débat.
Aahron sentit une pierre tomber dans le fond de son estomac à présent noueux. Il avait un mauvais pressentiment. Un très mauvais pressentiment…

Avec lenteur, la main toujours posée sur la rambarde de l’escalier, Aidan redescendit l’unique marche qu’il avait eu le temps de gravir son regard clair et soupçonneux tourné vers la cuisine et ses occupants. Aahron remarqua immédiatement que quelque chose clochait sur le visage de son petit frère. Cela dit, il aurait été difficile de manquer le filet de sang qui s’écoulait de son nez ou sa pommette déjà violacée, signe qu’il avait reçu un mauvais coup.

« Bon Dieu, Dan, qu’est-ce qui s’est passé ? » souffla le plus vieux avec inquiétude, dirigeant immédiatement ses pas vers lui

Mais le petit blond eut un mouvement de recule prudent en le voyant venir à lui et garda une main tendue dans sa direction, lui intimant l’ordre muet de rester à distance.
Qu’est-ce qui avait encore bien pu se passer ? Ils n’auraient décidément jamais la paix !
Un silence affreusement pesant s’étira encore durant d’interminables secondes, jusqu’à ce qu’Aidan se décide à le rompre d’une voix cassée.

« …Qu’est-ce que vous faites ? » les questionna-t-il, ses yeux azurés tournés vers Isaac et Allie qu’il n’avait plus vus depuis un moment
« Rien. Rien du tout » s’empressa de répondre Aahron en jetant un coup d’œil en direction des autres pour leur signaler qu’ils devraient appuyer ses dires « Et toi, qu’est-ce que tu fais ici ? Qu’est-ce qui… »
« Pourquoi vous êtes tous là ? » le coupa-t-il d’un ton dur, son regard azuré se braquant soudain vers les deux amants « Je savais pas que vous deviez rentrer aujourd’hui »
« Il nous ont fait la surprise » tenta encore de se justifier l’ainé, prenant un ton badin qui ne semblait duper personne, surtout pas son petit frère
« Et le fait qu’tu m’reparles subitement quand j’pose des questions, c’est une surprise ça aussi, Aahron ? » grinça-t-il avec une colère mal contenue, ses yeux rougis le fusillant
« Aidan… »

Le regard du plus jeune dévia vers la bouteille d’alcool et les quelques paquets de bonbons qu’il était le seul à consommer et qui trainaient encore sur la table de cuisine.

« T’as été fouiller dans mes affaires !? »
« Aidan, tu… »
« J’vous interromps c’est ça !? Vous aviez pas prévu que j’revienne aussi tôt, pas vrai ? »
« C’est pas ce que tu crois… »
« Bah tu vois, le fait que tu tiennes à l’préciser, ça m’donne plutôt envie de penser que c’est EXACTEMENT ce que je crois » railla le jeune homme dans une grimace écœurée
« Ecoute… »
« Nan ! Va t’faire foutre ! C’est moi qui ai plus envie d’te parler ou d’t’écouter maintenant ! Vous êtes une belle bande d’enfoirés ! » cracha-t-il en grimpant les premières marches de l’escalier
« Aidan, le prend pas comme ça » soupira Aahron qui en avait assez des mélodrames
« Ah oui ? Et comment je devrai prendre le fait que vous complotiez dans mon dos à ton avis ? Hm ? J’devrai l’prendre comment !? Vous êtes tous… » commença-t-il en relevant les yeux vers le reste de ses frères
« Tu vois, c’est exactement pour ça qu’on a organisé cette réunion ! » capitula Aahron, jugeant inutile de mentir davantage. De toute façon, ils avaient été pris en flagrant délit

Samuel avait raison. Ils souhaitaient qu’Aidan leur fasse confiance mais lui mentait et ne faisait rien pour gagner sa confiance. Il était temps qu’ils se bougent enfin un peu et assument leurs actes…
Ils étaient temps qu’ils fassent preuve de franchise les uns envers les autres.

« On ne peut pas parler avec toi » reprit-il dans un soupir las
« T’es qu’un gros connard, Aahron ! C’est toi qui voulais plus m’parler ! » aboya Aidan, les deux mains refermées avec colère sur la rambarde par-dessus laquelle il se penchait pour cracher son venin « Isaac et Allie étaient même pas là cette semaine et Samuel est soit en train de bosser, soit en train de baiser Charlie ! Alors viens pas m’dire que le problème vient de moi et de mon incapacité à parler ! Personne veut m’parler depuis l’autre fois alors viens pas raconter n’importe quoi pour sauver ton cul maintenant que j’vous ai surpris ! »
« Regarde dans quel état tu t’mets ! Tu penses que j’ai envie de parler avec toi quand tu es comme ça ? »
« Toute façon j’te l’ai dis, j’ai pas ENVIE de parler avec toi ! Avec toi ou avec qui que ce soit d’ailleurs ! Vous êtes tous des menteurs et des sales traitres ! …J’vous DETESTE ! »

Aahron poussa un lourd soupir dépité en voyant Aidan fuir dans les escaliers pour rejoindre l’étage. Il se retourna pour faire face au reste de la famille. Puisque parler du cas Aidan avait été son idée, ils s’étaient sans doute figuré que c’était à lui de gérer la situation…
Tiquant d’agacement, l’ainé refit face à l’escalier et se mit en marche, bien décidé à ne pas en rester là. Après une seconde, il entendit du mouvement derrière lui et comprit que ses frères lui emboitaient le pas.
En quelques enjambées, l’ouvrier se retrouva de l’autre côté de la porte du débarras dans lequel Aidan s’était dirigé. Des bruits facilement identifiables s’élevèrent bientôt et l’homme roula des yeux. Son jeune frère était en train de bloquer la porte avec les meubles qui se trouvaient à l’intérieur, à défaut de pouvoir faire tourner une clé dans la serrure.

« Aidan, ne sois pas stupide » tonna-t-il en croisant les bras sur sa poitrine, jetant un coup d’œil à Isaac qui lui avait emboité le pas
« Va t’faire ! Foutez-moi la paix et retournez comploter comme les sales fourbes que vous êtes ! »
« Pourquoi est-ce qu’il faut toujours que tu fasses ça ? »
« …Que j’fasse quoi ? » bougonna son frère depuis l’autre côté de la porte, faisant une pause dans ses déménagements
« Chaque fois que tu ouvres la bouche, on dirait que t’es sur les planches en train de réciter du Shakespeare »
« …Bah j’t’emmerde ! » se vexa son jeune frère en recommençant à pousser les meubles, faisant trembler la porte qu’ils rencontraient

Poussant un soupir, Aahron se tourna vers le reste de sa fratrie.

« Si quelqu’un a quelque chose à tenter pour le faire descendre de la scène, c’est l’moment… »
« J’t’ai entendu, PAUVRE TYPE ! »
« Rah, la ferme, Aidan »
« TOI-MÊME ! » aboya son frère avec rage « Et puis j’sortirai plus JAMAIS ! Comme ça vous serez CONTENTS ! » cria-t-il encore, jouant toujours les déménageurs
« Sam ? Isaac ? Décidez-vous avant qu’il s’épuise ou s’fasse mal… »
« Ta gueule ! Ta gueule !! TA GUEUUULE ! » brailla l’intéressé, alors qu’un bruit mat s’élevait de l’autre côté de la porte, signe qu’Aidan avait donné un coup dans l’un des meubles

Le plus jeune de la fratrie essuya sses yeux humides d’un rêver rageur de la main. Le souffle court et le cœur battant, Aidan continua de fixer haineusement la porte face à laquelle il se tenait, les membres tremblants d’un mélange de colère, d’épuisement et d’autres choses encore.
Il observa l’amas de meuble qu’il avait déplacé et accumulé devant l’entrée de la pièce et, satisfait, il se recula jusqu’au fond pour se laisser glisser sur le vieux parquet élimé. Les genoux relevés devant lui, le petit blond referma sa main sur son poignet gauche qui, une semaine encore, était encore platré. Son combat avec Nathaniel l’avait mis à rude épreuve et à présent, une douleur électrique se propageait dans tout son bras. Son déménagement n’avait sûrement rien arrangé non plus mais il avait été trop révolté pour le réaliser à ce moment-là. Quel crétin il pouvait être !

De l’autre côté de la pièce, il pouvait entendre ses frères et Allie chuchoter. Le terme exact était très probablement : comploter… La voix d’Isaac s’éleva bientôt mais Aidan choisit de ne pas lui répondre. Il avait une quantité incroyable de choses à dire mais savait de quelle manière il serait reçu.
Ils parlaient dans son dos et il n’avait pas son mot à dire, pas droit de s’en plaindre. C’était injuste ! Peut-être qu’il exagérait un peu les choses, peut-être qu’il avait un côté dramatique, mais il avait tous les droits de se plaindre !
Il venait de se faire casser la figure par Nathaniel Redd et, alors qu’il aspirait à trouver du réconfort auprès de ses frères, il trouvait ces derniers en train de jaser sur son compte.
Aidan renifla et ravala les larmes qui menaçaient de s’écouler sur ses joues pâles et meurtrie par l’un des coups que Logan lui avait asséné.

« Hé, Aidan... Ils veulent t'emmener à l'hosto faire des exams, et moi j'en ai ras le cul d'faire l'avocat, alors ce serait cool que tu sortes et qu'tu te défendes par toi-même, tu vois ? »

Les yeux du plus jeune des frères s’écarquillèrent sous la surprise.
Ils n’oseraient pas quand même… Ils n’allaient pas lui faire ça…
Et pourtant, Aidan savait au fond que si, ils en étaient tout à fait capable et que c’était très probablement de ça qu’ils étaient en train de parler quand il les avait interrompu.

« Mec, j'sais que t'as pas envie de parler de tout ça, mais tôt ou tard faudra que tu le fasses, et j'crois que là t'es plus en mesure de r'pousser... J't'ai jamais rien d'mandé jusque là, alors ce serait un peu pour me renvoyer la balle, qu'est-ce t'en penses ? »

Les sourcils d’Aidan se froncèrent sous la colère. Alors quoi, il devait accepter de se faire disséquer parce que Samuel ne lui avait jamais rien demandé ? Il ne sortirait pas, c’était hors de question ! Il resterait là jusqu’à…jusqu’à ce que…qu’il ait faim ! Voilà !
Mais alors qu’il allait répliquer, une petite voix quelque part lui cria de ne pas le faire et de réfléchir avant de parler. Une petite voix qui ressemblait à celle de sa mère et lui demandait de laisser une chance de s’expliquer à ses frères…
Aidan ferma les yeux une seconde, laissant une unique larme brûlante rouler sur sa joue alors qu’il enserrait son poignet avec un peu plus de force.

« J’ai déjà parlé à Isaac » lâcha-t-il soudain d’une voix tremblante mais assez nette pour que ses frères le comprenne depuis l’autre côté « J’lui ai raconté et…et j’irai pas à l’hôpital, ok !? J’suis pas un cobaye et j’veux pas qu’on m’examine pour…pour ça » s’agaça le petit blond, faisant référence à ses rêves

Après un instant, la voix d’Aahron s’éleva et Aidan devina qu’avant de prendre la parole, il avait posé sur son frère un regard chargé d’interrogations.

« De quoi tu as parlé avec Isaac ? »
« Tu sais bien d’quoi » marmonna-t-il dans un soupir las
« De quoi il t’as parlé, Isaac ? Qu’est-ce qu’il raconte » gronda l’ainé derrière la porte

Il n’était même plus énervé. Aahron avait finit par dépasser ce stade. A présent, l’ain des frères Donnelly se sentait simplement atterré par tous els rebondissements incroyables de leur histoire. Finalement, Aidan avait raison de prendre ces grands airs insupportables d’acteur de théâtre, ils étaient dans une pièce. Il n’y avait pas d’autres explications possibles à tout ceci ! C’était une farce géante et malheureusement pour lui, il ne connaissait pas ses répliques et le dénouement...

Son regard clair se posa sur la silhouette soudain rapetissante d’Isaac qui, à n’ne pas douté, aurait voulu disparaître dans le sol à l’instant. Il jeta également un rapide coup d’œil à Allie qui n’en menait pas bien large non plus, et termina par Samuel. Juste histoire de s’assurer qu’il n’était pas le seul à ne pas être dans les confidences. Si ça avait été le cas, il aurait probablement plié bagage et les aurait planté là avec leurs secrets et leurs cachoteries !

« Tu… » commença-t-il entre ses mâchoires crispées, décidant qu’aller plus loin était de toute manière inutile

Isaac l’avait déçu et il en avait pleinement conscience. Et aucun d’eux n’avait de toute façon agit avec plus d’intelligence et se rejeter la faute les uns sur els autres ne feraient rien avancer. Le mieux qu’il pouvait faire à présent, c’était d’écouter Aidan. De vraiment l’écouter cette fois.
Aahron se détourna donc pour refaire face à la porte close derrière laquelle se tenait son petit frère. Le silence s’étira un moment encore avant que ce dernier ne se décide enfin à reprendre la parole.

« C’est juste… Je sais pas comment l’expliquer. C’est comme Isaac a dit… Enfin c’est pas vraiment des… visions. J’ai jamais eu de vision comme Allie a eu » se lança le jeune homme d’une voix tremblante, avant de renifler bruyamment « Mais… enfin vous savez bien… »
« Les cauchemars… » souffla Aahron

Il n’était pas certain de vraiment suivre cette conversation ou d’en comprendre les tenants et aboutissants. Il était après tout question de visions et il était normal qu’il soit déstabilisé. Non, en réalité il était même complètement largué. Et pourtant, une part de lui trouvait qu’au contraire, tout les éléments trouvaient enfin leur place, toutes les pièces du puzzle jusque là dissimulées à sa vue venaient s’emboiter d’elles-mêmes et remplir les vides...

« Les cauchemars que tu fais, tu essaies de dire que ce seraient des genres de…prémonitions ? » demanda-t-il un ton plus haut, n’osant pas échanger un regard avec ses frères

Curieusement, il craignait qu’ils ne le jugent. Qu’ils l’accusent de rentrer dans les délires d’Aidan et de ne faire qu’empirer une situation déjà précaire.

« Non, c’est pas ça » soupira Aidan en reniflant à nouveau « Enfin c’est… plutôt l’inverse »
« L’inverse ? »
« Je vois des choses qui sont déjà arrivées le plus souvent »

Aahron ne répliqua rien, les sourcils froncés dans une expression songeuse. Qu’est-ce que ça voulait dire exactement ?

« Tout le monde fait ce genre de rêves, Aidan » finit-il par reprendre d’un ton incertain « Il n’y a rien d’étran… »
« Non, tu comprends pas. Je rêve de chose qui se sont déjà produites. Genre… exactement comme elles se sont produites. Comme…un genre de flash back, tu vois ? »
« Revivre des moments passés ça arri... »
« Non ! Ce ne sont pas MES souvenirs, Aahron ! » s’emporta Aidan en s’agitant à nouveau de l’autre côté de la porte « Je rêve de gens que je connais pas ! Que j’ai jamais vu et qui sont morts y a pt’être des siècles entiers ! Mais quand je rêve d’eux, je sais qui ils sont, je sais…je sais presque tout d’eux ! Je sais où je suis et pourquoi je suis là ! J’ai un passé, des amis, des souvenirs, une famille, j’ai…c’est comme si j’étais dans la tête de quelqu’un d’autre, tu comprends ? »

Et c’était le cas. Aahron avait l’impression de comprendre. Et en même temps, rien n’était moins sûr.

« Aidan, les cauchemars sont des projections de tes peurs et… »
« Rah fais pas chier, Aahron ! J’me suis renseigné sur le sujet figure-toi ! Je sais ce que c’est un cauchemar et je sais que vous pensez que c’est la mort de papa et maman qui m’fait ça ! Que j’suis encore sous le choc ou je sais pas quoi ! Mais y a pas que ça, je l’sais, d’accord ? Faut que vous m’croyez ! »
« On ne demande qu’à te croire mais… avoue que tout ça n’est pas très clair. Si tu sortais, peut-êt… »
« Non ! J’ai pas envie de sortir, j’suis très bien là où je suis ! » s’agaça le plus jeune avant de reprendre en marmonnant « Toute façon j’me suis fait mal et j’suis trop fatigué pour tout remettre »

Aahron leva les yeux au ciel. Evidemment… Mais il se garda de faire tout commentaire. Au lieu de ça, poussant un soupir, il s’installa sur le sol, appuyant son dos à la porte derrière laquelle se trouvait Aidan.

« Bon, continue »
« J’ai dis c’que j’avais à dire »
« Aidan… »
« T’as qu’à demander à Allie ! J’suis pas le seul monstre de la famille ! »

Le petit marquait un point... Même s'il n'y avait pas mis la forme. Le regard d'Aahron dévia alors, non pas pour se figer dans celui de la jeune métisse, mais dans ceux d'Isaac.

Aidan écouta Isaac puis Samuel prendre la parole tour à tour. Ils avaient migrés dans la chambre que lui et le barman partageaient depuis quelques semaines. Isaac avait été le première à predre place, bientôt rejoint par sa fiancée qui semblait bien pâle malgré son teint halé naturel. Aidan s’en voulait un peu de lui avoir jeté la pierre à présent et de l’avoir mêlée à tout ça. Cela dit, une autre part de lui trouvait que c’était plus juste qu’ils parlent tous les deux de leur « problème ». Sauf qu’il était sûrement plus apte à encaisser les conséquences de tout ça qu’elle en ce moment. Encore que, ce point était discutable.
A présent installé sur son lit aux côtés d’Aahron, le plus jeune de la fratrie imita le reste de celle-ci, se tournant vers Aahron pour connaître son avis sur la question.
En réalité, Isaac et lui avaient déjà eu cette conversation et abordé le sujet d’une visite nocturne au garage et Aidan était pour. A 100%.

Aahron les observa tour à tour mais, contrairement à ce que le petit blond s’était figuré, il ne monta pas sur ses grands chevaux pour leur répondre qu’ils étaient malades et que blablabla illégal blablabla problème avec la justice et le shérif s’ils se faisaient prendre et blablabla danger, stupide, décision de con…
Il prit une grande inspiration et aborda un air méditatif. Le silence s’étira quelques instants encore avant qu’il ne le rompe d’un ton grave, gardant ses yeux délavés dirigés vers le sol poussiéreux.

« Il va falloir faire preuve de discrétion pour une fois. Et j’entends par là que certains d’entre nous n’y mettront pas les pieds… »
« Il parle de moi là. Tu parles de moi » soupira Aidan sur un ton qui n’était pas vraiment interrogatif
« Je parle de toi » acquiesça Aahron en fixant son regard dans le sien « Je ne veux pas que tu t’approches de ce fichu garage ou de Nath. Ce n’est pas contre toi, mais après les évènements d'auj… »
« Ok. J’irai pas. Mais vous devez me promettre de pisser sur son mur pour moi ! »
« J’ai dis qu’on devait être discret, Dan’. Personne ne doit s’aperce… »
« Je plaisantais, détends-toi » lui sourit-il sans y mettre beaucoup de cœur cela dit

Un ange passa avant qu’Aahron reprenne la parole, se tournant à présent vers les trois autres.

« Je préférerai qu’Allie ne vienne pas, mais quelque chose me dit que… enfin… J’ai du mal à assimiler toute cette histoire de…hem... »
« Le mot que tu cherche c’est visions j'crois » intervint Aidan en gardant les yeux baissés sur son poignet douloureux
« …Merci… De visions donc, mais si jamais ça pouvait nous être d’une aide quelconque dans cette enquête… Si tu pouvais voir quelque chose qui nous échappe ou…enfin la décision t’appartient. Tu n’es pas obligée de te décider ce soir. Vous pouvez voir ça entre vous » ajouta-t-il en observant les deux amants tour à tour

Aidan observa son frère un instant, déstabilisé par son attitude. Aahron n’avait jamais vraiment pris la peine de demander son avis à la fiancée de son frère et le voir faire était assez perturbant… Et le voir rougir en le faisant rendait la scène encore plus étrange.

« Et Sammy, il peut venir lui ? Parce que si j’suis le SEUL à pas venir, là je vais devoir protester ! Puis si vous débarquer à 4, ça va être tout sauf discret, non ? »

Aahron écouta ses deux cadets débattre sur les avantages et inconvénients de se pointer au garage le soir même, pendant la séance de cinéma plein air. De son côté, la décision était déjà prise, il attendait juste qu’ils en aient fini pour faire part de son point de vue et ne pas les couper trop abruptement dans leur élan. Lorsqu’il s’y risquait, Isaac avait tendance à le prendre personnellement et s’offusquer de le voir jouer les chefs. La dernière chose dont ils avaient besoin, c’était d’une énième prise de bec. Surtout alors que la bombe « Aidan » venait tout juste d’être désamorcée, et sans trop de casse en plus.
La conversation se porta soudain une fois encore su les fameuses visions qu’Allie et son frère disaient avoir.
Et une fois encore, Aahron senti cet horrible sentiment de malaise l’envahir. Il porta sur le plus jeune de ses frères un regard qu’il aurait aimé moins… curieux, moins méfiant. Mais c’était plus fort que lui. Tout ça était perturbant, étrange, inquiétant et complètement surréaliste. Même s’il restait persuadé que quelque chose clochait chez lui, et qu’Aidan croyait en ce qu’il disait, il n’arrivait pas à se faire à cette histoire de « visions du passé ».

Mais avant que le petit blond ait pu prendre la parole, la voix d’Allie s’éleva. Elle répéta la phrase à propos de ses parents qu’il lui semblait déjà avoir entendue le jour où elle avait eu un malaise sur le pont.
Les sourcils clairs du trentenaire se froncèrent mais il ne fit toujours aucun commentaire et la laissa s’exprimer. Il ne pouvait s’empêcher de ressentir un peu de rancœur à son égard. Si ce qu’elle disait était vrai : pourquoi elle ? Pourquoi cette fille qui n’avait absolument aucun lien de parenté avec eux pourrait savoir des choses sur LEURS parents ? Pourquoi lui ne voyait rien ? Oh bien entendu, il avait de l’instinct et Samuel et Isaac également était arrivé à la conclusion que toute cette histoire d’accident puait la merde, et ça sans visions magiques. N’empêche qu’Aahron ne pouvait s’empêcher d’estimer que si quelqu’un avait dû voir quelque chose, ça aurait dû être lui…

Une fois le silence revenu, Aahron jugea le moment opportun pour reprendre la parole.

« Je pense qu’agir ce soir est prématuré » trancha-t-il en jetant un coup d’œil en direction du médecin « Ce serait une erreur, on sera jamais prêt à temps et ce genre de choses se prépare je suppose. Il nous faudra faire un repérage des lieux avant… Du moins je présume, c’est la première fois que j’envisage de pénétrer illégalement dans un bâtiment »
« Menteur… » murmura Aidan près de lui, sans daigner lever les yeux dans sa direction, un sourire discret étirant ses lèvres en coin
« Je pense…hem… je pense » reprit-il dans un raclement de gorge gêné « que ce serait vraiment pas prudent et… Enfin si tu veux parler à Nathaniel ce soir, je suis d’accord et ça pourrait nous être utile mais pour d'autre raisons. Mais…enfin ça non plus ce n’est peut-être pas prudent. Il s’est apparemment intéressé de près à ce que vous faisiez et il ne vaut mieux pas tenter le diable… » termina-t-il en se tournant à nouveau vers Isaac pour avoir son avis

Près de lui, Aidan souriait toujours, amusé par la manière dont il l’avait déstabilisé avec sa remarque. Inconsciemment, Aahron porta sa main sur la cicatrice qui ornait sa paume depuis des années et qu’il s’était fait quelques semaines après son départ de la maison, en essayant de cambrioler le domicile d’un couple de retraités plutôt farouches... Il n’avait jamais parlé de cette histoire à personne. Pas même à Trisha.
Décidément, ces histoire de visions étaient aussi déroutantes qu'agaçantes... Si Aidan était au courant pour ça (et Aahron ne doutait à présent plus qu'il le soit effectivement), que savait-il d'autre sur son compte au juste ? Sur leur compte à tous et sur Grayson et ses habitants...?