Après avoir mis de l'ordre dans le stand de restauration, après avoir pu manger un peu, après surtout avoir quitté Nathaniel et son regard assassin, Elizabeth avait enfin pu s'échapper un peu et parcourir les différentes aires d'activité offertes aux villageois. Elle avait bien tenté d'engager la conversation avec certains de ses concitoyens, mais elle sentait une certaine défiance chez eux. Visiblement, le poison instillé par Suzanna faisait son effet. Il fallait certes s'y attendre, mais Elizabeth avait espéré plus de soutien de la part des habitants de Grayson. A croire qu'on ne connaissait vraiment ceux qui partageait votre vie que lorsque les choses se compliquaient. Cela amena la jeune femme à se poser la question de ceux sur qui elle pouvait finalement compter. Plus tôt dans la journée, William n'avait pas eu l'air de lui tenir la moindre rigueur sur sa relation avec Declan, mais pouvait-elle en déduire qu'elle pouvait le compter dans ses soutiens ? Griffith ferait corps avec Declan, sans doute quoi qu'il advienne, et à dire vrai, elle pensait trouver plus de soutien parmi les femmes. Kathleen et Charlie, deux malmenées par la communauté mais à qui Elizabeth s'était bien gardée de porter le moindre jugement seraient sans doute compréhensives. Mais elle commencait à voir venir le moment où elle serait effectivement traitée en pestiférée.

Elle trouvait remarquable la facon dont chacun, trop bien pensants, était prompt à dispenser jugements et peines sans réfléchir au-dela des simples apparences. Elle pensait déja que tout cela était navrant auparavant, en être la prochaine cible la révoltait : elle avait pourtant donné plus que sa part pour le bien de Grayson, elle avait espéré un peu plus d'indulgence à son égard. Cependant, ca avait quelque chose de logique : dans un village où chacun portait le poids d'une faute ancestrale, rejeter la faute à la première occasion devait être salvateur.
William avait sans aucun doute raison. Il ne valait peut être pas la peine de porter le poids d'un héritage pour le bien d'une communauté qui ne le méritait pas... mais cela ne revenait-il pas à se poser elle aussi en juge ? En avait-elle seulement le droit ?

De nouvelles questions qui venaient s'ajouter à celles qui la tourmentaient déjà...

Elle se dirigeait finalement vers le stand boisson, afin de prendre un rafraichissement dans la chaleur torride désormais de mise à Grayson, quand elle croisa enfin un visage amical, et qu'elle accueillit avec un large sourire.

" Je me disais bien que je ne t'avais pas encore vue ! "

La matinée lui avait semblé moins longue que prévue. Elle avait discuté avec quelques personnes, le temps était donc passé plus vite. Malgré tout, rien d'intéressant ne s'était encore produit... Un peu d'agitation n'aurait pas fait de mal pour occuper l'esprit de la brune, même si cela était synonyme de problèmes pour quelqu'un ! Tout se passait bien pour une fois. Et ce calme elle le ressentait encore plus maintenant qu'elle se retrouvait seule à marcher dans le parc. Elle aurait bien pu retrouver James ou Ezra, deux hommes qu'elle avait côtoyer ce matin. Mais cette idée ne lui plaisait guère, car elle la ferait sûrement passer pour une femme collante. Et puis, la situation pouvait être pire, elle pourrait se coltiner une vieille bique qui lui rabâcherait cent fois la même chose ! Enfin de compte, se retrouver seule était beaucoup mieux. Mais il allait bien falloir qu'elle aille tâter de la foule. La chaleur écrasante de ce mois d'Août était une incitation à se diriger vers le stand des boissons. C'est donc d'un pas traînant qu'elle alla vers les rafraîchissements.

Une fois sur place, elle se faufila jusqu'au stand et demanda un verre d'eau bien fraîche. Il était tentant de boire une bière, mais là tout de suite, elle préférait quelque chose de plus désaltérant ! L'alcool attendrait la fin de la journée, quand la température sera un peu plus clémente... A peine eut-elle son verre dans la main qu'elle fut abordée par une autre brune, Élisabeth. Cette dernière est la gérante de l'épicerie du coin, et s'est par là qu'elles se sont rencontrées. Maintenant, elles sont amies, et partagent une passion pour les commérages ! Elle affichait un sourire et semblait contente de la voir. Jeanne sourit à son tour et lui répondit :

Mieux vaut tard que jamais comme on dit !

Et puis le sourire de Jeanne laissa place à une mine plus sérieuse. Bien qu'elle n'avait pas vu son amie de la journée, elle avait entendu certaines... rumeurs. Du moins pour le moment, elle ne prenait tout ça que pour des ragots. C'est grâce à une oreille indiscrète qu'elle avait pu obtenir ces informations. Personne ne lui avait rien dit en face... Alors était-ce juste des histoires imaginées ou la vérité ? Autant demandé à la principale intéressée ! Elle lui glissa, avec un regard complice :

Je ne t'ai pas vu de la matinée mais j'ai entendu parler de toi...

Elizabeth accueillit Jeanne comme on accueille une bouée de sauvetage : avec gratitude et les yeux pleins d'espoir. Depuis que la psychologue était à Grayson, Elizabeth avait découvert avec un certain bonheur les joies des commérages sans autre but que le simple plaisir de parler. Jeanne bien sur ne balancait jamais sur ses patients, et c'était bien normal. Mais sa salle d'attente lui prodiguait des ragots plaisants. Ces badineries étaient pour le moins agréables. Oh bien sur, une part d'Elizabeth était toujours à l'affut d'éléments pour les... affaires de Grayson. Mais dans l'ensemble, elle n'avait que rarement eut recours aux informations partagées avec Jeanne. Elles passaient de bons moments, sans la pression employeur-employée qu'elle connaissait avec Charlie.
Pourtant, si Elizabeth avait espéré une bulle de détente, elle déchanta vite : si Jeanne avait entendu parlé d'elle, l'épicière se doutait du sujet de la conversation.

" J'étais au service au stand restauration. Tu imagines comment c'est... Le coup de feu a été impossible. On a beau être patient, ce n'est pas facile de gérer les Pietsky qui ont du mal à choisir entre sandwich au thon et sandwich au jambon quand 15 personnes attendent derrière... Et Nathaniel a beau savoir faire du charme comme personne pour faire avaler la pilule à n'importe qui, ca n'en est pas moins horripilant... "

Elle fit une grimace avant d'aborder la suite de la discussion. Elle avait peur d'avance de ce que Jeanne pouvait lui rapporter, mais d'un autre côté, elle espérait pouvoir compter sur son amie pour lui donner les détails sans trop en rajouter. Et eventuellement sans porter de jugement. Après être passée entre les mains de Nathaniel, la derniere chose dont elle avait besoin, c'était que Jeanne se pose en donneuse de leçon... D'un autre côté, elle risquait fort de se montrer déçue qu'Elizabeth ne lui ai jamais parlé de son semblant d'histoire. Une dispute avec une amie en prime, ce serait parfait pour clore cette journée tellement joyeuse...

" Tu as entendu parlé de moi hein ? Fais moi peur... "

Elle fit quelques pas en direction des tables de pique-nique où elles pourraient s'installer avec leurs verres et parler à loisir.

Jeanne entra directement dans le vif du sujet. Pas de banalités ou de courtoisie avec son amie. De toute façon, jamais la psychologue ne pourrait garder la langue dans sa poche à ce sujet. Elle voulait savoir absolument ce qu'il en était de ces rumeurs ! Elizabeth se garda bien de dévoiler quoi que ce soit avant que Jeanne lui ai parlé de ce qu'elle avait entendu. Maligne la fille ! Au fond, elle ne savait pas ce que la psy avait entendu. Elle cacherait donc bien plus de choses que ce que Jeanne imaginait... Enfin, tout le monde a ses petits secrets !

Quelques rumeurs, entendues au détour d'un chemin...

Jeanne prenait des pincettes. Elle sentait tout de même qu'Elizabeth était méfiante, sur ses gardes. Elles n'avaient jamais encore vraiment parlé de petits secrets les concernant. En tout cas, pas qu'elles auraient entendu de la bouche d'une autre qu'elles... Jeanne ne lui avait jamais vraiment caché ses histoires extra-conjugales, même si elle n'aimait pas s'étaler la dessus. Et puis, il était sûrement de notoriété publique que la psychologue s'envoyait en l'air avec d'autres hommes que son mari... Cependant, elle se sentait un peu déçue de constater que ce n'était pas réciproque. Elizabeth ne s'était pas confiée à elle... Elle ne jugea pourtant pas, sachant qu'une situation pouvait avoir différentes facettes. Elle espérait que la jeune femme avait une bonne raison de lui avoir caché un détail aussi intéressant !

Toi et Declan... C'est vrai ?

Elles étaient maintenant assises l'une en face de l'autre à une table de pique-nique. Elles sirotaient leurs boissons, assez loin des oreilles indiscrètes. Elle essaya de ne pas se montrer trop inquisitrice, et ne demanda que si ce qu'elle avait entendu était vrai. Surtout, elle aurait l'air maligne si elle demandait des détails et que ce n'était pas vrai...

Tourner autours du pot, des fois, ca avait du bon. Ca permettait de préparer ses réponses, de se blinder face aux éventuelles attaques - volontaires ou non - , de trouver le moyen de présenter les choses sans qu'elles n'apparaissent comme d'innommables trahisons, bref, d'enrober les choses dans un couche de bienséance. Le problème, c'est que cela sous-entendait de faire face à quelqu'un qui aimait tourner autours du pot. Sauf que ce n'était pas le cas de Jeanne. Non, face à quelque chose d'aussi particulier qu'une affaire de fesses secrète, il ne fallait pas perdre de temps en vaines badineries...
Pendant une fraction de seconde de délire pur, Elizabeth avait espéré que les questions de Jeanne porteraient sur l'épicerie, sur Nathaniel, sur les Donnelly... N'importe quoi sauf Declan - dont elle n'avait pas envie de parler. Mais c'aurait été trop beau, et elle savait qu'elle et le shériff devaient être le potin du moment. Après tout, Suzanna y veillait, d'après ce qu'avait dit Nathaniel. Elle poussa donc un soupir un brin désespéré. Il allait falloir faire face maintenant. Faire comprendre comment une aventure d'un soir de déprime alcoolisée et sans conséquence avait pu se transformer en projets de vie commune si rapidement noyés dans les larmes de rage d'une adolescente trop gâtée.
Elizabeth laissa son regard se perdre sur la foule des Graysonniens qui s'ébattait, insouciante et paisible dans cette journée qui marquait un interlude bienvenu dans la tourmente du quotidien. L'interlude n'avait pas été pour tout le monde, mais elle imaginait que pour la plupart de ses concitoyens, la journée avait été bonne. Elle fit finalement face à son amie avec un air un peu triste avant de prendre une inspiration pour répondre.

" Oui, c'est vrai. "

Elle eut un petit haussement d'épaules et une grimace d'excuse, prévoyant la réaction de déception de Jeanne assise en face d'elle. Elle ne pouvait plus y faire grand chose si ce n'est tenter de lui expliquer ce qu'elle avait vécu et comment elle l'avait vécu. Avec la difficulté supplémentaire que Jeanne ignorait les secrets commun de Declan et elle, qui étaient pourtant au coeur de leur rapprochement. Elizabeth prit donc le parti de laisser Jeanne mener la discussion, et de ne répondre qu'à ce qu'elle pourrait, plutôt que de la précéder et risque de soulever plus de questions qu'il n'en n'existait finalement.

" Et là, je suis sure que tu as plein de questions, non ? " Elle eut un petit sourire, tentative de paix dans une discussion qui allait s'annoncer difficile.

Alors c'était vrai ? Élisabeth et Declan, Declan et Élisabeth... Le veuf n'était pas autant de glace que ce que Jeanne pensait. Elle ne s'était jamais vraiment intéressée à lui, personnage un peu trop public à son goût, mais ça ne l’empêchait pas de se demander si il savait tirer avec autre chose qu'un revolver... Et apparemment, il savait ! Des tas de questions se bousculaient dans la tête de la psychologue maintenant ! Devait-elle privilégier les questions qui satisferaient sa curiosité ou celles plus sérieuse ? « C'est un bon coup ? », ou « c'est du sérieux entre vous deux ? » De toute façon, les deux versions finiraient par sortir de sa bouche !

Si tu savais toutes les questions qui me passent dans la tête à cet instant !

répondit Jeanne avec un sourire. Elle sentait la gêne de son amie. Devenir le centre de la conversation sur un sujet aussi... délicat n'était pas une partie de plaisir sûrement. Voir sa vie sexuelle dévoilée au grand jour, disséquer par toutes les ménagères du village, se faire à moitié traîner dans la boue... Tout ça devait peser sur Élisabeth... La psychologue en oublia presque que son amie ne lui avait rien dit. Ça n'avait plus d'importance maintenant, elle était au courant !
Elle but une gorgée de son verre d'eau, et posa sa première question, qui lui semblait, après délibération de toutes ses neurones, la plus convenable pour commencer :

C'est du sérieux entre vous deux, ou c'est juste... comme ça, pour le plaisir ?

Elle posa un regard perçant sur Eli. Elle ne savait pas ce qui pourrait être le pire pour son amie, qu'elle s'envoie gentiment en l'air avec le shérif juste pour le plaisir, ou qu'elle se soit énamourée du veuf...

Elizabeth avait furieusement eut envie de vider son sac, depuis un moment, sans jamais vraiment oser. Sans en prendre le temps non plus. D'une certaine manière, et avec Suzanna qui braillait partout qu'elle était une trainée - Elizabeth était dure avec la jeune fille, Suzanna n'en faisait pas tant ; quoique... - , l'épicière aurait apprécié que quelqu'un mette les pieds dans le plat. En petite princesse, elle aurait eut envie que les habitants de la ville vienne s'enquérir d'elle. La désillusion que personne ne prenne la peine de se soucier de son ressenti avait été finalement plus grande qu'elle ne se l'était avoué, et avoir Jeanne tenue au courant par la rumeur qui lui posait la question la soulageait. Elle allait enfin pouvoir s'exprimer sur le sujet, faire entendre son avis, sa version de l'histoire, et ne plus passer pour le bourreau d'une enfant - tout aussi princesse qu'elle, à y bien penser.
D'un autre côté, alors qu'elle aurait voulu tout déballer, elle ne savait pas trop quoi dire, ni comment. Ni même par où commencer. Le début trouvait ses racines dans les ombres de Grayson auxquelles Jeanne n'était pas initiée, et ne pouvait donc pas appréhender. Comment pourrait-elle expliquer en quoi Declan et elle avait pu se rapprocher, quand Jeanne ignorait tout de la violence de Nathaniel, son goût pour le sang et son empressement à exécuter sa part de sombre travail ?
Alors elle espérait que Jeanne la lance avec ses questions. Sauf que bien sur, la psychologue devait déterminer la meilleure facon d'aborder les choses. Comprenant son problème, Elizabeth lui fit un pauvre sourire. Elle regardait passer un groupe d'enfants courant après un ballon d'un oeil distrait, quand finalement la première question tomba.

" Ha ! Excellente question... " Elle fit une grimace. " C'est le nerf de la guerre, n'est-ce pas ? Une affaire de bon temps, ou une affaire de long terme... " Elizabeth secoua la tête et prit une inspiration, faisant un vague geste de la main. " Au début, c'était en passant. Il n'y avait rien de plus que juste... enfin tu vois... Seulement... Ca s'est transformé en autre chose, progressivement... " Elle lanca un regard entendu à Jeanne. Même si Declan et elle n'avait jamais vraiment fait de déclaration enflammée, les intentions y étaient. Les projets aussi, mais ils semblaient tellement loin désormais... Elizabeth avait l'impression qu'ils appartenaient finalement à une autre.

Les histoires sans sentiments, Jeanne les connaît, et les redoute un peu aussi. Il suffit de s'attacher pour que tout devienne plus compliqué. Et les hommes... Ah les hommes ! Dès qu'on parle de sentiments ils paniquent et finissent par déguerpir la queue entre les jambes ! Declan était-il de ceux-la ? Élisabeth s'était-elle attachée et avait fait fuir son amant ? Tant de questions que Jeanne se posait, mais son amie ne semblait pas tentée à vider son sac... La psychologue allait sûrement devoir lui tirer les vers du nez... Mais Eli était gênée, et en aucun cas, elle ne voulait froisser son amie. Bref, un dilemme se posait à elle : essayer de tout savoir tout de suite, ou laisser la jeune femme se confier petit à petit ? Elle devait y aller en douceur, et poser les questions une par une, en ne passant pas du coq à l'âne. Savoir si Declan savait y faire avec les femmes n'était pas la priorité, sachant qu’Élisabeth avait l'air de souffrir de cette situation.

Qu'est ce qui s'est passé au juste ? Comment ça se fait que votre histoire finisse comme un potin croustillant pour Grayson ?

Jeanne avait bien une petite idée du pourquoi du comment, mais elle ne préférait pas aller trop vite en besogne et accuser quelqu'un de peut-être innocent. Il semblait à la psychologue que cela soit peu probable, vu que la fille du shérif était pourrie gâtée, et qu'elle se croyait tout permis. Briser un couple ne devait pas lui poser de problème... Sachant qu'en plus, dans son entourage on pouvait trouver le poison de Nathaniel Redd, ça ne lui faisait pas porter une robe de sainte !

Tu tiens le coup quand même ?

Jeanne s'inquiétait maintenant pour son amie, devenue en peu de temps une garce aux yeux de certaines personnes du village...

Elizabeth se demandait encore si c'était une bonne chose de tout raconter ou pas. Elle l'avait appelé de tout ses voeux, bien sur, pour pouvoir évacuer la tension d'une manière plus saine qu'en allant chercher des noises à Nathaniel ou qu'en projetant de s'imposer le pire défi de sa vie avec William. D'un autre côté, était-ce sage que de satisfaire la curiosité générale, même quand il s'agissait d'une amie ? Elizabeth aimait savoir ce qu'il se passait, et en discuter, mais elle n'aimait pas les médisances. La frontière était souvent ténue entre le potin informatif et le potin médisant, mais elle avait toujours eu l'impression de rester du bon côté de cette frontière. Or elle savait qu'en poursuivant la discussion, elle allait basculer du côté obscur du potin... Mais il était un peu tard pour revenir en arrière.

" A ton avis ? " elle eut un haussement d'épaules. " Il y a deux semaines, Declan avait organisé une soirée pour nous deux. On s'est disputé en prime... Ca commencait - et ca continue - à me peser, ces rendez-vous secrets, de devoir se cacher, de ne pas pouvoir vivre notre histoire de façon normale. J'ai envie d'une vraie relation, tu comprends ? " Elle poussa un soupir. " Alors bien sur, quand il a organisé un pique-nique en pleine nuit... " Elle roula des yeux d'un air entendu à l'intention de Jeanne : dans le genre rendez-vous secret, on se posait là. Il y avait de quoi péter un cable quand on espérait pouvoir entrer dans la lumière. " Donc on se disputait. Mais finalement, il m'a promis... il m'a promis qu'il allait faire ce qu'il fallait pour nous... Et c'est à ce moment là que Suzanna nous a trouvés... " elle avait insisté sur le prénom de la jeune fille en roulant des yeux, comme si elle parlait d'un abruti notoire, ce qui suffisait à exprimer tout l'agacement que l'adolescente faisait remonter en elle. " Et depuis... Declan ne m'a quasiment pas adressé la parole, en tout cas pas à ce sujet, et il s'abaisse devant cette gamine pour se faire pardonner... " Elle eut un sourire ironique. " Alors tu vois... J'ai un peu de mal à tenir le coup. Suzanna en parle comme d'un crime, mais jusque là, personne ne s'était posé la question de savoir ce que j'en disais. J'essaie de faire face mais... " elle refoulait ses larmes, comme elle l'avait fait toute la journée, et il n'était pas question de craquer. Elle voulait finir la journée sans perdre sa dignité, et jusque là, elle y arrivait plutôt bien. Mais ses efforts lui coûtaient, et ca se voyait.

La relation entre Elizabeth et Declan semblait sérieuse, enfin du moins jusqu'à ce que Suzanna y mette son grain de sel... Les deux tourtereaux avaient quand même bien su se cacher des habitants de Grayson puisque personne ne semblait au courant, et tout le monde était surpris de cette rumeur. Mais maintenant, avec l’aveu de la fille du shérif... le petit village s'en donnait à cœur joie pour casser du sucre sur le dos d’Élisabeth ! Et comme le fait remarquer celle-ci, personne ne semble vraiment essayer de comprendre la vérité dans cette histoire. En tant qu'amie, Jeanne n'imaginait pas que la gérante de l'épicerie avait tenté de faire du tort à Declan en salissant sa réputation. Elle n'était pas de ce genre, donc la psychologue croyait son amie. Si tout cela tournait au vinaigre, ce n'était sûrement que de la faute de Suzanna, cette gamine capricieuse et pourrie gâtée... Ce que Jeanne ne comprenait pas, c'est que Declan ne dise rien... Allait-il laissé sa fille pourrir sa vie jusqu'au bout ?

Je savais que Declan se faisait bouffer par sa fille, mais de là à stopper net une relation amoureuse parce qu'elle ne supportait pas que son père soit avec une autre femme...

En tant que psychologue, Jeanne ne voyait ça que comme une relation pas très saine... Suzanna était une jeune fille pas trop bête, enfin elle n'en avait pas l'air. Cependant on pouvait déceler dans sa démarche une jalousie infantile de n'avoir son père que pour elle. Elle ne devait sûrement pas vouloir le partager avec une autre femme... Declan n'était vraiment pas malin de se laisser faire non plus. Suzanna a l'âge de comprendre que son père puisse vouloir refaire sa vie ! Malheureusement, tout cela retombait maintenant sur Eli, l'infantilisme de Suzanne et la débilité de Declan.

Vous ne vous êtes pas reparlé avec Declan depuis ?

Elizabeth haussa les épaules d'un air absent. Bien sur qu'elle trouvait impensable que Declan la délaisse pour son affreuse petite rousse de fille. Enfin... Elizabeth ravala bien vite sa pensée. Suzie était jolie. Elle était juste très perturbée. D'aucun penserait que le jour où elle comprendrait l'importance de son héritage et des sacrifices consentis par son père pour lui offrir une belle vie, elle se calmerait. Mais l'épicière en doutait. Elle pariait plutôt sur le fait que de découvrir la face cachée de son village la rendrait définitivement hystérique et ingérable... Mais ca, elle ne pouvait décemment pas en parler à Jeanne. Encore une personne qui ne comprendrait pas, sans doute...

Elizabeth jouait avec son verre, tripotant les gouttes de condensation qui se formaient le long des parois, le tournant dans un sens ou dans l'autre, en se remémorant comment s'étaient passées ses dernières rencontres avec Declan. Ou plutôt ce qu'il ne s'était pas passé : il ne lui avait pas parlé, ne l'avait quasiment pas regardée, ne l'avait pas touchée... Et quand ils auraient pu avoir le temps d'un tête à tête pour remettre les choses à plat, il avait tourné le dos et avait vidé les lieux avant tout le monde. Elle secoua donc la tête à la négative.

" Rien du tout. Il m'évite comme la peste. Et il ne prend même pas de gant pour cela. C'est tellement gros que je me sens pathétique... pitoyable... piteuse... tu choisis le p qui te parait le plus indiqué... " Elle eut un pauvre sourire à sa tentative humoristique, mais elle savait que ca faisait à peine illusion. " Si au moins il prenait la peine de me dire ce qu'il en est exactement... Si je savais vraiment ce que je pouvais attendre, ou pas ! Mais non ! "

Elle n'ajouta pas qu'il n'était peut-être pas le seul à blamer : elle n'avait rien fait pour provoquer la rencontre, rien fait pour obliger Declan à lui parler, quand elle aurait pu faire irruption dans son bureau et le forcer à la confrontation. D'un autre côté, avec ce que Nathaniel avait laissé sous-entendre, elle n'était plus sure de vouloir seulement une réponse.

" Mais je ne sais même pas si ca en vaut la peine, de toute facon... Je crois... Enfin... il parait qu'il... a repris de mauvaises habitudes... "

Jeanne comprenait bien comment son amie devait se sentir. Être ignorée est quelque chose de vraiment déplaisant. Son mari est devenu expert pour passer à coté d'elle sans lui jeter le moindre coup d’œil. Seulement, leur relation avait duré bien plus longtemps, et sûrement c'était-elle usée... Entre Declan et Élisabeth, ce n'était pas la même chose... Il aurait pu avoir au moins la décence d'avoir une discussion avec elle. Une discussion d'adulte ! Sans que sa fille ne s'en mêle quoi... Mais apparemment c'était trop demander...

Tu as tenté de lui parler toi ?

Si Jeanne avait été à la place d'Elizabeth, elle ne se serait pas gênée pour le coincer quelque part et lui dire ses quatre vérités. Seulement, tout le monde n'était pas comme elle, et ça pouvait paraître difficile de faire ce genre de premier pas. Mais si Declan ne faisait rien, peut être qu'elle devait si mettre... Sauf si elle trouvait mieux cette situation, et qu'elle se sentait capable de surmonter cette épreuve.

Mauvaises habitudes ? Parlait-elle d'alcool ? De drogues ? D'autre chose ? Jeanne voyait bien Declan un verre à la main plutôt que de se faire des piquouses, mais bon... Demander ce qui en était ne lui paraissait pas une bonne idée. Au fond, ça ne la regardait pas...

Je sais que ce que je vais te dire va te paraître cliché, mais si ça peut t'aider : tu es mieux sans lui ! Il suffit juste que tu t'en rendes compte...

Elle arrêta là son beau discours. Tout ça c'était des conneries ! Du blabla de gonzesses pour se dire qu'on valait mieux que les hommes. Mieux sans lui ce n'était pas sur...

Et merde ! Me voilà à sortir les mêmes conneries que dans les films...

Elle sourit faiblement, tentant peut être de dédramatiser tout cela. Mais ce n'était pas sa blague idiote qui allait lui remonter le moral et lui faire penser à autre chose...

Elizabeth eut un pauvre sourire en réponse à celui de Jeanne. Evidemment, dans des cas pareils, on pouvait difficilement passer à côté des clichés habituels : "tu vaux mieux que ca", "c'est un enfoiré qui ne sais pas sa chance", etc... Seulement ces phrases toutes faites destinées à remonter le moral n'avaient souvent rien à voir avec la réalité. Ignorant ce qu'il se passait dans la tête de Declan, pouvait-elle seulement deviner ce qu'il s'y passait ? Elle en savait certes beaucoup... La perte de sa femme dans des circonstances dramatiques, devoir élever seul sa fille l'avait sans aucun doute modelé de telle sorte qu'il n'avait certes plus rien à voir avec le jeune homme qu'elle idolâtrait adolescente. Et elle avait l'impression d'être revenue des années en arrière, quand elle s'était cachée dans une grange pour pleurer, le jour de son mariage. Le temps avait passé, bien sur, mais les sensations étaient les mêmes. Ou pire, puisque cette fois, elle avait goûté à sa peau, et plus encore.

" Je ne sais pas... Je veux dire... On était tellement bien ! J'ai du mal à croire que ca s'arrête de la sorte... "

Elle haussa les épaules en considérant l'autre question de Jeanne. Avait-elle essayé de le confronter ? De lui faire dire ce qui allait ou pas ? A lui faire entendre raison ? Bien sur, il n'était pas dans le caractère d'Elizabeth d'aller chercher quelqu'un par la peau des fesses pour une discussion entre quatre yeux. Mais avait-elle finalement tenté quelque chose, ou avait-elle attendu bêtement ?
Elle n'était pas sure d'aimer la réponse à ces questions, aussi tenta-t-elle une pirouette.

" Comment parler avec quelqu'un qui t'ignore ? On s'est croisé, mais à chaque fois, il m'évite, détourne le regard, voire me tourne carrément le dos... Je ne peux pas le forcer à entendre ce qu'il n'a pas envie d'écouter ! Et je ne sais pas comment faire en sorte qu'il ne me fuit pas... "

Elizabeth secoua la tête.

" De toute facon, vu comment se comporte Suzanna, je ne sais pas si j'ai vraiment envie de recoller les morceaux... Elle sera toujours un obstacle... "

Comment parler avec quelqu'un qui vous ignore ? Quelle bonne question ! Malheureusement elle n'avait pas la réponse... En tout cas, pas la bonne ! Jeanne avait tenté quelques fois de provoquer Liam, d'avoir une réaction de sa part. Elle avait bien réussi à en avoir, mais ça n'avait pas arrangé les choses ! Les avait-elle dégrader ? Peut être... Elle préférait ne pas donner cette méthode à Eli, ça ferait sûrement plus de mal que de bien. Elle réfléchit à un conseil qu'elle pourrait bien lui donner. Elle était psy, des conseils elle en donnait souvent. Sauf que la, rien ne lui venait... Alors elle lui répondit la seule chose qui lui passa par la tête :

Avec le temps ça ira mieux...

Soit elle finirait par s'en remettre et passer à un autre homme, soit Declan se rendrait compte de sa connerie et reviendrait vers elle. En attendant, Élisabeth ne pouvait pas faire grand chose, surtout quand Suzanna était dans le coin... Son père continuerait sûrement à être du coté de sa fille, même si Eli faisait des pieds et des mains pour que ça s'arrange. Et même si le couple se reformait, on ne vivait pas dans le pays des bisounours, et tout ne serait pas rose. Suzanna mènerait la vie dure à Eli, qui finira par péter un câble et découper la gamine en petits morceaux avec un couteau de boucher ! Enfin ça c'était le pire des cas pour son amie, pas pour Suzanna...

Tu trouveras un autre mec. Doit bien en avoir un autre de potable dans ce patelin...

Jeanne but une gorgée de son verre d'eau, et regarda alentour. Ouais, la tout de suite, y'avait pas grand chose à se mettre sous la dent... Et puis son esprit se perdit dans l'énumération des hommes qui pouvait bien valoir le coup dans le coin. Peu d'entre eux pouvait être retenu, mais heureusement ils pouvaient resservir plus d'une fois...

Avec le temps... Bien sur que les choses changeraient. Savoir si elles s'arrangeraient serait un autre problème, une autre préoccupation. Elizabeth pouvait compter sur les doigts d'une main les personnes auxquelles elle pouvait faire confiance. Et à la réflexion, aucune d'entre elles ne détenait entièrement les clés de ce qui faisait sa vie. Que ce soit William, Jeanne, Charlie ou même Declan à qui elle faisait confiance malgré la déception qu'il lui avait causée... Elle cachait forcément une part d'elle, par nécessité ou par devoir. D'ailleurs, à la réflexion, qui se confie complètement à quelqu'un ? On gardait forcément une part de secret, de choses que l'on ne peut avouer, ou que l'on ne veut avouer, soit parce que ce sont de trop sombres secrets, soit parce qu'ils représentent un risque trop grand d'être méjugé. Et rares étaient ceux qui acceptaient d'être jugés pour ce qu'ils étaient, dans leur entier. A Grayson sans doute plus qu'ailleurs...
Mais les choses changeraient, de cela Elizabeth était sure.

" On verra... Mais merci. Ca fait plaisir de voir que quelqu'un a la foi... " ajouta-t-elle avec une certaine ironie.

La suite lui arracha un sourire acide. Trouver quelqu'un d'autre à Grayson ? Les célibataires de son age n'étaient pas légion, et pas tous forcément à son goût.

" Ouh ca c'est une liste qui risque d'être courte ! Entre les trop jeunes, les trop vieux, les repris de justice... Ou ceux déjà mariés... " elle jeta un regard entendu et un brin envieux à son amie qui avait la chance ( ) d'avoir épousé un homme physiquement intelligent et fou d'elle en prime. C'était un couple qui représentait une sorte d'idéal pour l'épicière. " ... Le tour va être vite fait... Si tu regardes les célibataires, il n'y a pas foule... Ezra ? Calvin ?! Logan ?! Qui est-ce que j'oublie ? " Son ton en évoquant Logan et Calvin laissait entendre qu'elle ne les citait pas sérieusement et qu'elle n'envisageait pas le moins du monde d'entamer l'ombre d'une relation avec eux. Surtout Logan, au vu de sa charmante famille....

La foi... Sans doute Jeanne l'avait-elle en effet. Elle espérait toujours que les choses s'arrangent, et elle n'était pas prête de laisser tomber cette idée. Si elle le faisait, la première chose à laquelle elle devrait se résoudre était que son mariage était foutu, et que la seule solution qu'ils avaient, avec Liam, était de divorcer... Malgré qu'ils ne se parlaient plus, elle savait qu'elle n'était pas seule chez elle. Ils ne se touchaient plus, mais elle savait que dans son lit, son mari se trouvait à coté d'elle. Si ils divorçaient, elle n'aurait plus ces certitudes, et qu'aurait-elle à la place ? Ses amants ? Ils n'étaient rien pour elle... Alors Jeanne pensait qu'avec du temps, son mariage finirait par refaire surface, et qu’Élisabeth finirait par se remettre de sa rupture avec Declan...

Une liste courte, extrêmement courte ! Élisabeth avait raison, à Grayson il n'y avait pas beaucoup de mâles à se mettre sous la dent. Enfin Jeanne avait déjà une liste plus longue que son amie. Cette dernière cherchait sûrement une relation durable avec un homme, pour se marier et faire des mômes... La psy ne cherchait que des coups d'un soir, des histoires sans lendemain. Elle avait déjà un homme... Homme qui ne semblait pas laissé indifférente sa chère amie ! En même temps, Liam n'était pas désagréable à regarder. Heureusement, Eli n'avait pas pour objectif de s'en prendre aux hommes mariés. Imaginer Liam avec une autre femme ne lui plaisait guère. Elle préféra chasser cette idée de sa tête.

En effet le tour était vite fait chez Élisabeth ! Ezra, Calvin, Logan... Aucun des trois ne semblait être le parti idéal... Pour le peu qu'elle avait discuté avec Ezra, elle le trouvait sympathique mais sans plus, même si physiquement il avait du charme. Calvin... La liste des points négatifs à son sujet était aussi longue que son bras ! Et Logan... Un Redd... Rien que cela jouait en sa défaveur !

Ouais... C'est pas ici qu'il se cache le prince charmant ! plaisanta-t-elle.

Elizabeth haussa les sourcils d'un air entendu. Jeanne s'accordait à dire qu'il n'y avait que peu de chance de trouver quelqu'un de convenable à Grayson. La solution serait simple, en temps normal : quitter la ville, refaire sa vie ailleurs. C'était idéal : ici, elle continuerait sans doute encore longtemps à sentir peser sur elle les regards réprobateurs des médisants, de Suzanna, et elle subirait la pression d'avoir Declan si proche et pourtant si loin. Ailleurs, elle pourrait repartir de zéro, faire de nouvelles rencontres et surtout avoir plus de choix. Seulement on était à Grayson. Pire, elle était née à Grayson. Quitter le village ne lui serait pas forcément plus favorable. Pas en l'état, en tout cas.
Alors tout espoir de trouver un jour un prince charmant quelconque était réduit à néant. Aucun homme ici n'avait le profil, même Declan, qui avait de toute facon un passé tellement chargé qu'il trainait avec lui en toute circonstance.

Elle offrit donc un sourire amère à Jeanne avant de lui répondre.

" Non. En tout cas, pas pour l'instant. Mais je ne désespère pas : un jour, il arrivera sur un magnifique cheval blanc et sera prêt à s'installer ici avec moi pour continuer à veiller sur mes parents et rester avec mes amis ! " Elle fit une grimace. Voila bien un scénario qui ne risquait pas de se produire un jour. Elle allait donc se contenter de l'imaginer, sans se poser plus de question. Et faire en sorte de pouvoir quitter ce fichu village, ou de changer les choses, d'une manière ou d'une autre...

Elle jeta un coup d'oeil derrière elle.
" J'imagine qu'il faudrait que je retourne sur le stand, m'assurer que tout est bien rangé. De toute facon, ca ne changera pas grand chose de parler de tout ca, n'est-ce pas ? Ca fait deux semaines... Ce n'est plus maintenant qu'il reviendra, et qui sait ce que l'avenir nous réserve... " Elle haussa les épaules avec fatalisme, un sentiment bien trop familier désormais... Mais elle avait pris son parti, et sa résolution était de tourner la page, de passer à autre chose, et notamment, de suivre les intention de William.

" Merci à toi en tout cas... "

Jeanne sourit à Élisabeth. Si au moins les princes charmants pouvaient débarquer à cheval blanc ça serait bien, beaucoup plus pratique pour les repérer... Seulement ce n'était pas le cas, et bien souvent il fallait se farcir quelques connards pour tomber sur un type bien. Enfin, son amie ne semblait pas perdre espoir non plus. Qui sait ? Peut être que sa moitié était sur le chemin et qu'il n'allait pas tarder à débarquer à Grayson... Ou pas... On ne pouvait pas dire qu'il y avait un tas d'étrangers qui s'installaient dans le coin... Elle aurait plus de chance si c'était elle qui allait le chercher, mais Jeanne ne pensait pas Eli prête à quitter son petit village.

La psychologue réfléchissait toujours aux différentes options pour son amie de tomber sur un homme bien, quand elle lui indiqua qu'elle allait peut être repartir au stand... C'est vrai qu'elle tenait un stand, contrairement à Jeanne... En plus, elle avait raison. En parler ne changerait pas grand chose, à part qu'elle avait pu déballer son sac à quelqu'un, vu que tout le monde s'accordait sur la version de Suzanna... Bref, elles auraient sûrement une autre occasion de parler de tout ça.

De rien, je suis là pour ça ! lui répondit-elle en levant son verre. Son amie se leva et retourna à ses occupations. Jeanne quant à elle, resta assise le temps de finir son verre.