03.2. A rocky road to Salvation [David & Logan]

Les murs avaient du être blanc à une époque. Une époque lointaine, bien avant sa naissance.
Aujourd’hui, la peinture avait caillée et jaunie, recouverte par endroit d’auréoles d’un vert moussu et humide. Les plantes grimpantes avaient déjà englouties toutes la base de la maison et rampaient lentement mais sûrement vers les hauteurs de la bâtisse de bois. Certaines des fenêtres n’avaient pas résistés aux années et trônaient, béantes, cernées de longues trainées noires et de volets moisis à moitiés arrachés. Le petit toit du porche menaçait de s’écrouler depuis un moment déjà, mais personne ne s’était donné la peine de solidifier la poutre qui le soutenait. Pourtant, la vieille maison des Black n’étaient pas si abandonnées que ça. L’endroit n’avait plus abrité de locataires depuis des lustres, cela dit le sol de la bâtisse était bien souvent foulé. Et pour cause, c’était de là que se propageait la maladie qui gangrénait Grayson depuis plusieurs générations. C’était le centre nerveux, l’incarnation matérielle du secret. C’était là qu’ils se réunissaient entre eux lorsqu’il fallait se dire des choses qu’aucunes autres oreilles ne pouvaient ni entendre, ni comprendre. C’était là que terminaient les corps inanimés des prétendus accidentés de la route. Et c’était là qu’Il apparaissait pour leur ôter la vie.
Personne ne savait exactement ce qu’il advenait des étrangers enfermés dans cette maison, seuls quelques hurlements réussissaient parfois à percer les murs et à donner une petite idée des supplices qu’ils subissaient. C’était la règle qu’Il leur avait imposé il y a bien longtemps. Tout ce qu’ils devaient faire, c’est mettre la main sur un couple et les laissés dans cette maison. Le reste n’était pas leurs affaires. Seuls deux personnes avaient enfreint cette règle à sa connaissance : Nathaniel et lui.
Il y a 15 ans environs, son cousin l’y avait entrainé un soir, et ils avaient glissé un œil par la fenêtre. C’est là qu’il avait vu l’ogre. Du moins, c’est ce qu’il avait pensé du haut de ses 11 ans puisqu’il ignorait encore tout à cette époque. Ca n’était qu’à l’adolescence qu’il avait réellement comprit ce qu’il avait vu, et qui l’avait terrorisé.
Pourtant ça n’avait pas empêché ni l’ogre ni la maison d’occuper la majorité des cauchemars de Logan, même après avoir appris que l’ogre ne viendrait jamais pour lui.

Le jeune comptable ignorait si c’était l’alcool, son imagination où la réalité, mais l’horreur semblait suinter de la façade même de cette baraque. L’antre de l’ogre suppurait le malaise, tel un visage grimaçant et angoissé. Une aura pesante et étouffante planait lourdement tout autour de la maison et imprégnait l’atmosphère. La végétation elle-même paraissait plus agressive à ses alentours, comme nourrie d’une énergie trop sombre. L’air s’y faisait immobile et pourtant porteuse de quelques échos sordides. Les hurlements poussés ici avaient laissés des cicatrices, et même lorsque le calme était complet comme maintenant, Logan jurait de pouvoir les entendre, encore et encore.

Il ne lui arrivait pas souvent d’aller de lui-même vers cet endroit, seulement lorsque son humeur était très sombre. Ce soir, c’était le cas.
Est-ce qu’il avait bu autant parce qu’il se sentait mal, ou est-ce qu’il se sentait mal parce qu’il avait bu autant ? Peu importait, il avait déambulé un long moment avant de venir s’échouer ici. Et comme d’habitude il était resté hypnotisé par le magnétisme macabre de la bâtisse.
Puis sortit de nulle part, il avait explosé de colère, oubliant sa côte cassée et son dos malmené. Maladroitement, il avait ramassé plusieurs cailloux pour les projeter avec force sur la maison.
Il finit par se faire peur lui-même en sursautant lorsque le bruit du verre qui éclate raisonna dans le silence nocturne. Il avait touché une fenêtre qui avait explosée sous l’impacte. Il en était tombé sur les fesses, dans les hautes herbes, le cœur battant et la respiration insidieusement douloureuse.
Durant quelques instants, le jeune homme fut prit d’une envie de rire de lui-même, … jusqu’à ce que les cailloux qu’il venait de lancer ne lui sois envoyer. Sans un son, il venait de ressortir par la même fenêtre pour atterrir entre les jambes d’un Logan déconfit. Il resta coi quelques instants encore, puis n’osant même pas relevé ses yeux noirs sur la maison, il se redressa aussi vite qu’il le pouvait et détala en direction du chemin qui remontait la colline. Sa fuite ne dura qu’environs douze secondes, avant qu’il ne se prenne les pieds dans une racine et qu’il ne s’étale de tout son long dans un concert de grognements, de gémissements de douleur et d’insultes alcoolisées crachées à l’encontre de tout l’univers.

Ses pensées étaient occupées presque vingt-quatre heures par jour par le déchirement, tantôt par les regrets soudains face au fait qu’il eut violé son propre code d’éthique et la loi, tantôt par une froide et sourde rancune elle-même divisée sur deux nouvelles réalité bien différente. Parfois, en plein milieu d’un des champs des Fergusons, une forte envie d’aller confronter agressivement les Redd lui prenait, mais à chaque fois, l’instant suivant une vague de culpabilité et d’horreur effaçait de tels plans peu civilisés. Cela durait depuis des jours et Handel commençait à croire que cela allait venir à bout de sa patience et sa santé mentale, deux choses qu’il eut toujours cru immuables chez lui.

La journée d’avant, il fut si désespéré par ces tumultes intérieures que, dès qu’il fut de retour chez lui, David alla trouver une vieille bouteille de Jim Beam presque vide qui avait appartenu à sa grand-mère, elle qui ne pu la terminer avant de trépasser et lui qui n’y toucha jamais par après sauf pour l’empaqueté lorsqu’il déménagea dans cette maison isolée. Handel, ne s’étant jamais rendu réellement ivre même lorsqu’il sortait prendre une bière avec les rares camarades qu’il avait en ville, mais sachant tout de même que l’alcool avait le pouvoir de chasser toutes pensées logiques et d’effacer la mémoire temporairement, consomma la bouteille. Le faible volume d’alcool ne lui fit presque rien et, quelque peu agacé de ceci mais aussi curieux du goût d’une boisson forte qui ne serait pas passé date, l’employé de ferme se rendit à un commerce en ville le soir suivant en rentrant des champs pour acquérir une bouteille plus fraîche et pleine cette fois.

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David était déjà à quelques petits verres non dilués de son breuvage, pas même certain qu’il s’y prenait comme il le fallait ainsi assis avec sa bouteille et le liquide ambré à la table de sa cuisine. Il pu observer qu’il ressentait quelques sensations étranges qu’il tentait d’analyser, quelque chose ressemblant à ces baisses de pression lorsque l’on tente de marcher et travailler sans boiter sur une cheville foulée par exemple...

Il allait se verser une verre de plus lorsqu’il fut cependant dérangé par le bruit facilement reconnaissable de verre fracassé tout prêt, son porté facilement jusqu’à lui par les fenêtre qu’il eut entrouvertes plus tôt dans le vain espoir de laisser un peu d’air frais pénétrer. Alerté, David se leva brusquement et tendit la tête vers la source du bruit, mais fut bientôt assaillit d’une espèce de vertige qui le déconcentra aussitôt.

Les premiers effets de l’alcool, il aurait du se douter qu’ils étaient plus prononcé debout qu’assis.

Tentant de rester la tête froide malgré le fait qu’il sentait la chaleur lui grimper au visage, la bouteille encore en mains, David se dirigea vers le salon le plus prudemment qu’il le pouvait afin de jeter un coup d’œil à l’extérieur par la fenêtre. Malgré tout, l’impression que son cerveau n’était plus en contact avec ses jambes et que sa vision avait une fraction de seconde de retard sur ses mouvements de tête et d’œil le fit tituber, l’entreprise s’avérant plus ardue qu’il ne l’aurait cru. Lorsqu’il pu enfin s’accrocher au cadre de sa fenêtre pour demeurer droit sur ses deux pieds, il chercha un bon instant la source du bruit jusqu’à ce qu’il ait aperçu plus loin une silhouette sombre s’agiter au sol et lever la poussière tout autour d’elle. L’autre se trouvait à quelque pas du chemin de terre passant par là, en diagonale derrière la maison d’Handel, dans les herbes en friche juste sur le terrain de la fameuse demeure abandonnée.

« Oh non… »

David murmura pour lui-même avec une sorte d’horreur, se remémorant tous ce qu’on lui avait dit au sujet de cet endroit maudit. L’homme fronça soudainement les sourcils : sa propre voix lui semblait étrangère, sa bouche lui semblait difficile à contrôler. Surpris, il fit fonctionner sa mâchoire une fois de plus avant que son esprit grisé ne comprenne qu’il s’agissait là d’un autre symptôme de l’ivresse.

À la fois surpris et méfiant face à cette nouvelle condition, David ne pu cependant empêcher cette impulsion le poussant à stupidement prévenir la silhouette au loin de s’approcher encore plus de la maison de tous les horreurs : il se repoussa en une position de marche en s’aidant du mur et, désorienté, se dirigea vers la porte arrière de sa demeure.

Il sortit en claquant la porte contre le revêtement extérieur de son domicile sans le faire exprès et oublia de la refermer alors qu’il glissa et tomba assis dans les trois marches menant au niveau du sol. Mais à peine son dos avait-il touché le bois de l’escalier qu’il transféra son poids pour se projeter de l’avant et se remettre sur pied pour poursuivre sa marche, luttant avec entêtement et une incompréhension presque enfantine de ce qui l’embrouillait autant.
Le canadien arriva à une douzaine de mètres de sa cible et s’immobilisa subitement –bien qu’il tanguait toujours un peu- ce qu’il vit alors lui donnant envie de s’esclaffer : la personne au sol à quelques pas de la maison abandonnée, c’était Logan Redd. Justement un de ceux qu’il soupçonnait avoir joué un rôle dans cette histoire d’incendie puis de fausse accusations au bureau du shérif, une des personnes qu’il désirait fortement interroger lui-même…
Quoique ce Logan n’avait pas l’air pour sa part plus alerte pour l’instant à bien y penser…

Dans la cervelle embrouillée de l’homme du Nord, un plan fermenta rapidement : et s’il sympathisait avec l’autre pour subtilement lui tirer les vers du nez pendant que Redd semblait ivre ? Après tout il avait encore la bouteille en main, cela pourrait servir d’un atout encore plus intéressant pour manipuler l’autre homme… Et puis rien de plus censé ne lui venait en tête de toute manière.

«Hey, Logan !” David appela-t-il l’autre en levant un bras pour le saluer et attire son attention à la fois

((OOC : ugh, me semble que ça suck comme réponse... long et pitoyable, avec D qui vole l'alcool de sa mère-grand crevée XD hum… enfin <_< Cool ton intro en passant, pauvre moustachu, c’qui lui arrive!))

Face contre terre, Logan s’accrochait au gazon dans l’attente que le décor arrête de tourner avec autant de violence autour de lui. Il avait cessé de tomber depuis de longues secondes maintenant, pourtant il continuait d’avoir l’impression d’être trimballé dans tous les sens. Dans ce genre de moment, d’habitude, Logan prenait de longues et lentes respirations pour tenter de se calmer et de retrouver l’équilibre. Seulement sa côte cassée lui faisait tellement mal après cette chute qu’il était presque contraint à l’apnée. La douleur pulsait dans sa poitrine à chaque battement de cœur affolé et ses poumons en feu n’arrangeaient rien. Il avait l’impression d’être seul, sur un radeau en pleine mer, atteint par la gangrène à cause d’une morsure de requin blanc.

C’est très spécifique comme impression dis-donc…

C’était surtout l’image qui lui était venue avant de rouvrir les yeux dans un nouveau gémissement plaintif. Celui-ci fut néanmoins couvert par le bruit d’une porte que l’on ouvre et qui claque. Il sembla au jeune homme distinguer l’aura d’une lumière électrique à travers quelques arbrisseaux et autres herbes folles qui bordaient le chemin où il se trouvait. Par contre, l’inverse se passa par la suite, et les bruits de pas qui approchent furent couvert par le son intérieur de son propre cœur agité par la peur et la douleur.
Cette constatation eu pour effet bénéfique de détourner un rien l’attention du garagiste de sa douleur tandis qu’il tentait tant bien que mal de distinguer quelque chose dans la pénombre, à travers le voile flou et alcoolisé qui déformait sa vue.

D’un côté, Logan était plutôt contrarié qu’un témoin soit présent. Il fallait toujours que quelqu’un traine dans les environs quand il se rendait lamentable. Il avait systématiquement droit au témoin gênant et non désiré durant ses plus lourds excès, comme une fatalité presque risible tant elle le rendait… fataliste. Bref.
Et de l’autre côté, avec ce qui venait de se passer près de la maison des Black, il était en quelque sorte rassuré par cette présence humaine qu’il n’avait pas prévu mais qui tombait à pique. D’ailleurs, s’il s’était retrouvé seul, dans le noir complet, et aussi désorienté, après un moment pareil et dans un état tel que le sien, Logan se serait sans doute laissé aller à paniquer.

Puis le faisant sursauter, le jeune homme entendit prononcer son nom dans un salut somme toute léger mais surtout, singulièrement décalé par rapport à la situation. Même aussi saoul et aussi mal, Logan pouvait le dire. C’était David qui se tenait au dessus de lui. Il ne l’avait pas encore aperçu, mais il avait reconnu sa voix par contre. Du coup, il s’était aussi soudainement souvenu que David vivait en effet à proximité de la maison des Black et qu’il était logique qu’il lui tombe dessus en réalité.
Cette constatation termina d’ailleurs de le ramener au peu de réalité qu’il pouvait encore percevoir.
Dans un effort pénible et agrémenté de grognement douloureux, Logan pivota sur le côté et se laissa ensuite choir sur le dos tel une baleine avachie sur le rivage d’un océan agité.
Il ne répliqua pas tout de suite à son salut et ils s’observèrent ainsi durant un petit moment.

« Hey David… » articula Logan d’une voix rauque sans y mettre aucun entrain

Il déglutit péniblement et cligna des paupières pour chasser les quelques petites larmes qui étaient venue y poindre. Ce ne fut qu’a ce moment-là qu’il perçu le goût typique du sang sur sa langue. Il avait du se rouvrir la lèvre en tombant. La peur d’avoir un nouveau morceau de squelette en miette le prit au ventre l’espace de quelques secondes avant qu’une lassitude blasée ne chasse ce sentiment.

Il se contenta de tendre le bras en avant dans l’assurance que ce brave David comprendrait qu’il avait vraiment besoin d’aide et qu’il n’était pas allongé dans l’herbe par plaisir…

David ne put s’empêcher de se demander sur le coup si Logan n’eut pas été frappé par une voiture puis rejeté sur le bord du chemin sans plus de soin: l'autre homme semblait souffrir le martyr alors qu'il se retournait avec difficulté, dévoilant du même coup une multitude de bleus et d’égratignures sur son visage, une coupure plus sérieuse déjà en train de cicatriser au dessus de son sourcil. Un peu de sang entachait l’intérieur de sa lèvre inférieure, pointant sa gueule vermeille suffisamment pour qu’on devina sa présence Une panoplie de couleurs peu attrayantes, l’homme de ferme remarqua, très rapidement surpris par l’amusement que cette constatation lui procurait aussi bêtement.

Peut-être souffrait-il d’une commotion cérébrale, ce Redd... Handel chassa cette idée de son esprit ralentit, percevant les relents de la bière se dégageant de l’autre. Ou du moins cela ne venait pas de lui-même, Handel n'ayant pris que du whisky... Les deux ivrognes se regardèrent longuement sans plus d’émotion.

Logan tendit soudainement le bras, membre que David observa avec incompréhension l’espace d’un seconde avant d’en saisir la signification. Il s’en saisit et commença à tirer le poids mort vers lui, cependant son propre sens de l’équilibre le trahi sans plus de cérémonie : l’employé de ferme tangua vers l’avant et tituba presque aussitôt, une contorsion assez disgracieuse étant la seule chose qui l’empêcha de s’affaler de tout son poids directement sur Redd.

Au lieu de cela, il tomba à genoux et sur un coude alors que d’une main il tenta de sauver la mise à sa bouteille, cette position à trois points d’appui seulement se révélant tout aussi instable pour une personne quelque peu grisé par le fort. Il s’écroula vers le côté et l’avant à la fois, son épaule ne supportant pas son poids encaissant le choc en premier avant que David ne s’écrase l’estomac contre le sol dans un grognement étouffé.

« Okay, je vais réessayer… La bouteille est intacte au moins… »

David déclara en se redressant, tentant d’articuler le plus possible pour dissimuler le fait que sa bouche lui paraissait à demi paralysée. Il demeura assis dans la poussière un instant, presque hypnotisé par une nuit si sombre et à peine éclairée par la lune et la porte qu’il eut laissé ouverte en sortant. Voir sa propre demeure rappela au Nordique qu’il sorti d’abord pour une raison particulière, celle de manipuler l’autre homme pour lui dérober la vérité.
Mais par où commencer, avait-il un plan d’action?
Peut-être commencer par mettre l’autre en confiance en sympathisant, eux qui ne se parlaient pratiquement que quelques fois par année, la moitié du temps pour des raisons techniques lorsqu’ils travaillaient ensemble pour une fête du village.

Tu venais ici pour rencontrer quelqu’un? C’est pourtant assez désert dans les parages, du moins si on m'oublie moi...

David lâcha simplement en haussant les épaules et en dévissant le bouchon de son Jim Beam, servant ainsi à Logan ce qu’il pouvait trouver de mieux comme bavardage amical avant de prendre une gorgée de sa boisson. Maladroitement, il indiqua la bouteille d’un signe de la main, demandant ainsi à son interlocuteur s’il en voulait également. Il ne prit pas la peine de mentionner qu'il savait l'endroit moins désert qu'on l'aurait cru, mais bien sûr personne parmis les Redd ne devait savoir qu'il savait...

Logan se redressait à peine de son retour forcé au sol poussiéreux, ses intentions difficiles à lire pour l’employé de ferme sur l’instant : ce dernier décida donc de seulement poser le contenant au sol et se taire, fronçant les sourcils avec une touche d’agacement.

De tous les manches à balais de Grayson il avait fallut qu’il tombe sur le pire. Même pas foutu de le relever correctement. Du moins c’est ce que pensait Logan en essayant de ne pas gémir de douleur, question de dignité déjà bien trop bafouée ces derniers temps. Le problème en réalité ça n’était pas la maladresse de David, c’était plutôt sa putain de côte cassée qui le martyrisait un peu plus à chaque mouvement. Du coup, tout mouvement superflu lui donnait des envies de meurtre difficilement gérables. L’alcool qui parasitait ses veines servait d’inhibiteur à la colère, fort heureusement. Le problème était qu’en chutant, il avait perdu sa bouteille. Une chose était certaine, il allait avoir besoin de carburant d’ici peu de temps car il n’avait nullement l’intention de dessaouler avant l’aube.
Il cru un instant que la bouteille que tenait David était la sienne qu’il avait trouvé par terre et avait simplement ramassé avant de venir s’écrouler presque sur lui et le laisser retomber dans l’herbe comme un sac de patate endolori. Après meilleure observation il réalisa que l’alcool qui trônait dans la main calleuse de son vis-à-vis n’était pas à lui. Ce très cher David n’était apparemment pas si ingénu qu’il en avait l’air… les apparences étaient trompeuses en tout cas.

Cette constatation eut pour effet bénéfique de détacher un peu l’esprit de Logan des pensées négatives et de la souffrance qui sévissait dans sa poitrine. La question de l’homme de ferme termina de le distraire.
S’il venait rencontrer quelqu’un ? C’était totalement stupide comme question. Déjà, il était d’accord pour dire que David vivait un peu en reclus, mais même lui devait savoir que personne n’avait jamais envie de le rencontrer nulle part. Même David devait avoir entendu parler de sa réputation scandaleuse. Sans oublier l’endroit où ils se trouvaient. On ne pouvait pas trouver endroit plus mort et plus désert au monde. Sauf peut-être dans les coins les plus paumés de chine ou quelque chose comme ça…
Et surtout, personne n’avait jamais envie de venir ici. David était le seul assez fou pour supporter de vivre dans cet endroit malsain. Ca n’était pas un lieu de rendez-vous très prisé donc. Enfin, sauf pour les rendez-vous avec le diable en personne évidemment…

« Ouais » lança donc Logan, sa voix rauque couvrant à peine le son que produisaient leur mouvements dans l’herbe sèche et la poussière du chemin « Je venais rencontrer ta sœur… ça s’est pas très bien passé »

Il laissa passer un courte seconde de silence et partit d’un grand rire rauque et déraillant qui dévia en un glapissement de douleur, ses deux mains crispées sur son torse.

« Oh pitié, relève-moi, essaye de … pas m’tuer » hoqueta Logan en incitant son partenaire à se bouger.

Celui-ci sembla enfin piger qu’il avait très mal quelque part et qu’il y avait légèrement urgence. Il se redressa donc et l’aida enfin à se redresser tant bien que mal, pas beaucoup plus sûr que lui sur ses deux jambes.

« Je… j’ai perdu ma bouteille par… là » pointa vaguement Logan, son autre main encore cramponnée à la chemise de David pour ne pas tomber à nouveau.

Il lança ensuite un regard circulaire et ses yeux sombres rencontrèrent la silhouette macabre de la maison des Black, entrecoupée d’arbre qui lui bouchaient la vue, mais pas assez pour la dissimuler totalement. Franchement, Logan n’avait jamais réalisé que David vivait aussi près de cet endroit.
L’image du caillou qu’il avait envoyé par la fenêtre lui revint en mémoire et un frisson lui parcouru l’échine.

« Non… laisse tomber la bouteille… je… j’veux utiliser tes chiottes »

Mensonge pour se faire inviter à l’intérieur. Il ne voulait pas avouer qu’il crevait de peur et qu’il regrettait amèrement d’être venu s’enivrer dans le coin. Mais il n’avait pas non plus envie de rester seul dans le noir, dans cet endroit qui lui glaçait le sang.

Sa sœur? Mais il n’avait pas de sœur pourtant… L’esprit embrouillé de David demeura quelque peu confus par l’affirmation de Logan jusqu’à ce que ce dernier éclate d’un rire ne radiant pas d’allégresse et de réel bien-être. L’employé de ferme comprit du coup qu’on se moquait de lui malgré toutes ses manœuvres qu’il voulait les plus polies possibles, son irritation montant d’un cran. Il prêta main forte à l’homme au sol malgré tout, se montrant plus prudent maintenant qu’il savait son propre équilibre précaire et l’homme qu’il tentait amadouer blessé. Même que, à observer ses mouvements raides et pénibles malgré son intoxication plus avancée que celle de David, l’étranger conclu que Redd devait être blessé ailleurs qu’au visage, à l’estomac ou aux côtes sans doute.

Son degré d’agacement grimpa encore un peu lorsque l’autre se servit de sa chemise comme d’une poignée tout en bafouillant au sujet d’une bouteille perdue, puis augmentant une fois de plus lorsque Logan exigea tout bonnement de pouvoir utiliser sa salle d’eau. Bien sûr il n’avait pas prévu de tirer les vers du nez de l’autre homme assis sur un sol poussiéreux en plein milieu de la nuit, mais l’idée qu’un homme exécrable, conspirateur, et peut-être même en partie responsable de l’incident qui avait failli tuer le fils de William, soit malade et empeste sa salle de bain ne lui plaisait pas vraiment.

« Très bien, alors nous… on y va. »

David fit d’une voix tendue, et non pas seulement par l’effort de pratiquement soulever un homme adulte aux jambes ramollies par l’alcool. C’est que sa patience légendaire était mise à l’épreuve une fois de plus en moins d’un mois, sa propre séance de beuverie aidant plutôt à affaiblir sa carapace de neutralité. Dans une manœuvre assez risquée et disgracieuse, il attrapa sa bouteille de bourbon avant de se mettre ne route, un air sombre au visage.

Mi traînant mi supportant Logan, Handel fit de son mieux pour ne pas brutaliser l’autre, ni vaciller ni se prendre les pieds dans les moindres creux et cailloux au sol alors qu’il progressait lentement vers la porte laissée ouverte, phare dans la nuit, de sa demeure. Il aurait bien aimé pouvoir faire le chemin plus vite, craignant à tout moment que le contenu de l’estomac de Redd ne se vide sur son jeans et ses bottes de travail.
David s’érafla une fois de plus les tibias dans les petits escaliers menant chez lui et faillit oublier une fois de plus de refermer la porte derrière lui en entrant. Il l’aurait fait s’il n’avait pas aperçu tous les gros papillons de nuit voletant autour du luminaire de sa salle à manger, les insectes s’étant invités par dizaines lorsqu’il avait laissé la porte grande ouverte. Les ombres virevoltantes que ces petites créatures projetaient sur les murs lui donnèrent des vertiges, et Handel s’empressa de mener Logan à la salle d’eau.

Heureusement pour lui, les anciens propriétaires de la maison firent construire une deuxième salle de bain avec water cabinet au rez-de-chaussée : le tandem n’aurait jamais été capable de grimper les escaliers pour atteindre l’autre pièce.
Devant la porte des chiottes, l’invité blessé se dégagea de lui-même du support du Nordique pour s’avancer dans la pièce, sauf que, plutôt que de se précipiter sur la cuvette comme David l’aurait cru, Logan se retourna péniblement pour faire face au maitre des lieu et lui lancer un regard presque agacé qu’Handel n’apprécia pas vraiment.
Il préférait garder sa dignité ou quelque chose du genre? Ce qui était certain, c’est que cette ingratitude continuait d’irriter l’employé de ferme.

« Bien, j’imagine que… Bon, je serai à la cuisine… Essais de bien viser le bol, s’il te plait. »

Ce dernier fit en pointant du pouce le couloir dans son dos, tentant de rendre son ton le plus digne et clairement prononcé qu’il le pouvait dans sa condition. Il retourna ensuite sur ses pas, les nerfs à vif l’envie de se resservir un verre s’imposant à lui de plus en plus.

« Essais de bien viser le bol » répéta Logan dans sa barbe, prenant une petite voix moqueuse haut perché mais discrète que l’autre ne pouvait entendre.

Le jeune homme ne prit même pas la peine de fermer la porte de la petite salle d’eau où il se trouvait à présent. Il resta d’abord un peu planté là, debout, le souffle encore un peu court et son rythme cardiaque peinant à ralentir. Cela dit, maintenant qu’il était à l’intérieur de chez David, et que la lumière électrique inondait ses environs sans laisser la moindre zone d’ombre, la peur avait cessé de lui tordre l’estomac. Baissant ses yeux sombres sur ses vêtements, il tâcha d’épousseter ceux-ci et de leur redonner une forme vaguement convenable. Quelques brins d’herbe et un peu de poussière étaient restés collé à son jean et à son tee-shirt, et malgré ses gestes rendus maladroits par l’alcool, le jeune comptable réussit à retrouver un rien de dignité.
Il s’avança d’un pas trainant un peu plus loin dans la salle de bain pour lancer un regard torve au miroir, qui le lui rendait avec un peu de défis.
Après avoir inspecté son reflet, Logan esquissa une moue affligée et se détourna pour faire ce que David lui avait demandé faire, à savoir : viser le bol.
Il remonta la lunette, fit sauter la braguette, et se soulagea la vessie dans un soupir contenté et alcoolisé. Se faisant, il laissa enfin ses yeux un peu vitreux vagabonder sur le décor.

Une chose certaine, David et lui n’avaient pas le même sens de la déco. Ici, c’était plutôt sobre et bien rangé, à l’image du propriétaire. C’était même un rien trop rangé d’ailleurs. Personne n’aurait pu dire qu’un célibataire taciturne de presque trente ans vivait aussi. On aurait dit la salle de bain d’une vieille vierge de cinquante balais, le vernis à ongle dans les coins en moins.
Heureusement, ça ne faisait pas gay non plus, sinon, Logan aurait remonté sa braguette et aurait préféré affronter la noirceur extérieur et les démons qui y rôdaient plutôt que de rester là.

Mais bref, une fois reculotté, le comptable du garage s’extirpa de la salle de bain dans un reniflement peu gracieux. Et c’est avec un air de touriste éméché qu’il déboula dans la cuisine de la maison.
David s’y trouvait, en pleine chasse au papillon de nuit. Logan jeta un coup d’œil bref vers la porte et continua d’avancer jusqu’à celle-ci afin de la fermer dans un claquement sec.
Rien à voir avec les papillons de nuits. Ces bestioles ne le dérangeaient guère. C’était simplement pour se rassurer encore un peu plus. Il avait beau s’être éloigné de la maison des Black, celle-ci n’était pas loin et l’image du caillou continuait de tourner en boucle quelque part à l’intérieur de son esprit embrumé par les effluves de l’alcool.

« C’est coquet chez toi » commenta Logan sur un ton un brin railleur mais pas agressif « Hey t’aurais pas à boire ? »

Pique assiette de première, Logan ne ratait jamais une occasion de boire gratuitement, et même si David n’avait pas l’air gay, il avait l’air un peu naïf et maladroit. Il ne verrait sans doute rien venir.

« Tu fume ? On peut fumer chez toi ? » questionna encore le jeune homme de sa voix rendue rauque par les contusions qui parsemaient sa gorge.

Il n’attendit cela dit aucune réponse et commençaient déjà à farfouiller dans ses poches afin de sortir son paquet et de s’allumer une cigarette bien méritée après toutes ces émotions.

Après tout que risquait-il! David se servit effectivement un verre du liquide ambré en réprimant un soupir agacé, espérant non pas seulement que son invité ne ruine pas sa salle de bain, mais aussi qu’il ne tombe pas raide mort ou presque sur place. Il n’avait pas du tout envie de s’occuper d’un Redd rendu inconscient par l’abus d’alcool et désirait encore moins devoir choisir entre transporter un grand corps flasque jusqu’à sa propre demeure ou l’héberger quelque part dans la sienne.
Maintenant c’était le jeu d’ombre étourdissant des papillons de nuit qui l’agaçait et, avec une gorgée de bourbon pour le courage, l’homme se leva de sa chaise de cuisine en chancelant légèrement avant de se lancer dans cette chasse ridicule. Bien qu’il préféra la poursuivre et ignorer Logan le temps qu’il ne décide à lui adresser la parole. Là aussi il aurait pourtant préférer ignorer l’autres à entendre les commentaires impertinents qu’il eut à dire.

Handel dévisagea Logan alors que ce dernier s’alluma une cigarette sans même remarquer qu’il était observé, mais réalisa rapidement que cela ne lui apporterait rien de jeter des regards désapprobateur à cet individu. Le nordique réprima un soupir en se remémorant qu’il devait gagner la confiance de l’autre pour l’interroger plutôt que le virer de sa maison et se dirigea jusqu’à son réfrigérateur. Il tira la porte de l’électro-ménagé décoré seulement d’un calendrier fixé avec un aimant pour jeter un coup d’œil à l’intérieur

« J’imagine que pour une fois un peu de fumée ne eut déranger… » David glissa à mi-voix en parcourant le frigo des yeux « À boire j’ai de l’eau, du lait, de la limonade, le Jim Beam sur la table ou de la bière Alexander Keith’s… Je ne sais pas ce que tu veux, mais j’ose croire qu’autour d’un verre de quoi que ce soit, on va pouvoir discuter. »

Il leva les yeux par-dessus la porte du frigo, guettant la réaction de Logan un instant : après tout, il devait s’assurer que l’esprit était favorable à un petit interrogatoire. Même si de toute façon il aurait préféré y aller avec beaucoup moins de finesse, arracher la cigarette des lèvres tuméfiées de l’autre et le brusquer quelque peu afin de lui enlever une réponse. Il en avait amplement le droit quand il y pensait : lui et son cousin eurent tenté de le faire accuser de l’incendie des dernières semaines, c’était bien assez grave !

« Rien de bien sérieux cependant, juste quelques questions qui me sont venus en tête dernièrement, mais puisque l’on n’a pas souvent l’occasion de se croiser depuis, je trouve que ce serait un bon moment »

La fraîcheur que dégageait l’électroménager lui faisait du bien sous cette canicule, bien qu’il savait que de laisser la porte ouverte trop longtemps pourrait faire surchauffer le moteur de l’appareil.

((OOC : haaaaa, réponse très naze, désolée de t’avoir fait attendre pour si peu .____. ))

Rien ne paraissait menaçant dans le décor qui entourait Logan, pas plus que le propriétaire des lieux.
Logan et David n’avaient pas été à l’école ensemble mais cela faisait tout de même des années maintenant que le Canadien trainait dans le coin et même si Logan n’avait d’intérêt pour rien ni pour personne (mis à part ses cousins et Kathleen évidemment !), il lui était tout de même arrivé de le croiser assez souvent ces dix dernières années. David allait et venait en tracteur la plus part du temps, pour le Maire Ferguson, et il lui arrivait de passer devant le garage pour se rendre dans les champs qui entouraient le village. Sans oublier le drugstore où il l’avait également vu plusieurs fois, l’épicerie et ce genre d’endroits communautaires. C’était surtout lors des cinémas plein airs qu’ils s’étaient côtoyés le plus finalement, parce qu’ils finissaient souvent en binôme pour l’entretien du parc. Normal après tout que ce job ingrat soit refilé à l’étranger nordique solitaire et pratiquement muet ainsi qu’à l’alcoolique notoire, problématique et attardé du village…
Cela dit, la plus part du temps, Logan avait profité de l’apparente docilité de David pour se tirer et le laisser gérer le boulot tout seul. Alors mêmes s’ils s’étaient très souvent croisés, ils ne se connaissaient pas vraiment. Ils avaient au moins cela en commun d’être relativement asociale.

Tout ça pour en venir au fait que depuis le temps qu’ils se croisaient, jamais encore le comptable n’avait ressentit la moindre menace venant du fermier. Il s’était souvent contenté d’écouter Nath’ le critiquer avec fiel et de ricaner ensuite, faute d’avoir quoi que ce soit à répondre où le moindre réel intérêt pour le sujet.

Cependant, les choses venaient de prendre un tout nouveau tournant pour Logan. Lorsque David avait prononcé les mots « on va pouvoir discuter », son estomac s’était immédiatement contracté, tout comme sa gorge déjà douloureuse. Le reste du discours de son ôte avait terminé de le plonger dans l’angoisse.
C’était exactement de cette manière là que s’y prenait toujours son père avant de lui foutre une trempe d’enfer. Du moins lorsqu’il était plus jeune car aujourd’hui, avec l’expérience, il pouvait voir venir la tempête de loin et réussissait à l’éviter la plus part du temps. Son père avait vieilli et lui-même s’était endurcit, alors il suffisait à Logan de se mettre à courir pour distancer son paternel avant qu’il ne le choppe. Après ça, il lui suffisait de rester vigilent et de l’éviter soigneusement jusqu’à ce que Patrick abandonne l’idée de lui en coller une.
Sauf qu’en ce moment, courir n’était pas une option. Se prendre une branlée non plus d’ailleurs. Il avait déjà eut son lot de ce côté-là et n’était plus capable ni d’éviter quoi que ce soit, ni de fuir. Avec son père, et Nathaniel, il était bien obligé de faire profil bas en ce moment, et d’éviter toutes les personnes qui mourraient d’envie de lui mettre la main dessus pour le faire mordre la poussière, comme tous les Donnelly, sans oublier Grifith…

Mais ceux-là, l’avantage, c’est qu’il savait à quoi s’en tenir et qu’il était plus ou moins capable de les voir venir. David en revanche ? Il ne s’était pas méfier un instant, trop obnubilé qu’il était par la maison des Black et la frayeur qu’il s’était fait. Alors pourquoi lui en voulait-il ? Qu’avait-il fait exactement ? Car pour Logan, ça ne faisait pas l’ombre d’un doute, ce qui se préparait n’était pas bon. Pas bon du tout.
Il connaissait le refrain par cœur, car c’était exactement comme ça que procédait son père lorsqu’il avait dans l’idée de le corriger. Il arrivait l’air de rien et se montrait soudainement et étrangement courtois. « Il faut qu’on discute fils » qu’il lui disait en l’incitant à le suivre dans son bureau. « Allons donc, pourquoi tu tire cette gueule Logan ? T’as quelque chose à te reprocher ? Je veux juste te poser quelques questions mon garçon » qu’il disait avant de verrouiller la porte derrière lui. Et Logan se retrouvait prit au piège dans son bureau sans autre choix que de serrer les dents en attendant que ça passe.

Branché en pilot automatique de survie, le jeune homme ne fit cela dit aucun mouvement pour essayer de fuir comme il en crevait d’envie. Il avait une bonne excuse pour laisser la peur le paralyser : Avec sa côte en compote il ne pouvait pas être assez rapide pour lui échapper.
Le souffle un peu court, il se contenta de désigner la bouteille de Jim Beam qui reposait sur la table, la bouche trop sèche pour tenter d’articuler quoi que ce soit.
D’ailleurs il garda le silence et resta planté sur place sans plus oser tirer sur sa cigarette qui se consumait entre ses doigts tremblants à cause de l’alcool et de la peur.
Il garda ses deux pupilles d’un noir d’encre braquées sur le Canadien pour épier le moindre de ses mouvements. S’il projetait de le frapper, au moins Logan pourrait essayer de se défendre, ou tout du moins protéger les os qui étaient déjà cassés pour laisser tout le loisir à David d’en casser d’autres…

OOC : pas grave, moi j'ai kiffé ton post lol
Désolée de l'absence de dialogue de mon côté, mais David a fait peur à mon Logan avec son introduction ahah ilest déjà en mode chien battu peureux. Va lui falloir beaucoup de Jim Beam pour se détendre XDDD

Il venait à peine de dire ces mots qu’il perçu un changement dans les yeux de son interlocuteur. David ne sut s’il s’agissait d’un effet secondaire de l’alcool de plus, mais un évènement de son adolescence lui revint à l’esprit sur le moment, le replongeant dans un décor plus rude et moins fertile que les campagnes du Missouri. C’était le chien de l’ivrogne de son petit village natal, une bête bâtarde qu’on aurait dit croisée entre un coyote et un pitbull, une vraie tornade lorsqu’elle était d’humeur joviale. Et lorsqu’elle devenait trop turbulente, son maître ne se gênait pas un instant pour lui infliger de sévères corrections. Ce qui frappa surtout David alors qu’il se tenait immobile devant son frigo physiquement, mais à des milles au nord en pensée, c’était le regard de la créature à ces moments. Un mélange de résignement, de peur, d’amertume et de nombreuses autres émotions qu’il ne pouvait déchiffrer…

C’était presque ce qu’il croyait voir sur un visage humain, encadré de cheveux sombre et de meurtrissures. Était-ce pour lui que cette expression était adressée? Alors une personne le redoutait sur l’instant, on le regardait avec autre chose que de l’indifférence. Impossible, David ne pouvait se souvenir qu’une telle chose lui soit arrivée auparavant. Et pourtant, le silence de l’autre, son immobilité crispée : tout y était…

L’employé de ferme referma la porte du frigo, son regard jusqu’alors quelque peu embué par l’alcool soudainement éclairci : il sentit en lui une étrange effervescence de sentiments partagés, mais surtout l’impression d’avoir pour une fois le dessus sur quelqu’un d’autre, une personne qu’il ne tenait pas dans son cœur pour le moment et qu’il fréquentait présentement que pour obtenir quelques informations. Encore plus étrange : David réalisa que cela lui causait un certain amusement insoupçonné couplé à son étonnement initial.

Que signifiait ceci? Le nordique fronça brièvement les sourcils, fixant un court instant le vide alors que son esprit enivré tentait de saisir la situation, avant de reporter son attention sur la figure complètement figée devant lui

« Bien »

Avec la lenteur de quelqu’un se sentant observé, Handel se dirigea vers l’armoire de cuisine pour se saisir de verre court et large ressemblant à ceux qu’utilisent les héros des vieux films noir et blanc de sa grand-mère lorsqu’ils boivent du whisky. Il le rapporta –en vacillant à peine et en gardant un visage de marbre- à la table en savourant le plaisir coupable que cela lui procurait. Il posa le verre juste devant Logan, ignora les quelques cendres de cigarette tombant sur la table et servit une quantité de l’alcool fort à son invité. Il alla ensuite se placer à l’autre bout de la table pour s’appuyer sur le dossier de sa chaise plutôt que de s’y asseoir, histoire d’entretenir un aspect intimidant : debout alors que l’autre était pratiquement écraser sur son siège, les muscles de ses bras de travailleur perceptibles sous les manches de sa chemise

« Je n’ai pas de glace, désolé: ce n’est pas dans mes habitudes de servir des cocktails, je ne possède donc pas l’é… l’équipement nécessaire. » David fit une pause, attendit que Logan ait prit une longue gorgée tout en l’observant, puis ajouta : « En fait, il se trouve que j’ai été convoqué au poste il y a de cela quelques jours. Là un fait assez étrange s’est trouvé porté à mon attention pendant la séance. Rien de bien grave et c’est tant mieux, mais ça aurait pu dégénérer d’une façon ou d’une autre en un énorme malentendu… Mais puisque je t’ai aperçu aux alentours toi et ton cousin, je me demandais surtout si tu avais entendu quoi que ce soit à ce sujet, que ce soit à ton propre interrogatoire ou non…»

((OOC: haha, je me met en retard au boulot pour répodre, mais j'ai pas eut le temps de me relire <_< en espérant que c'est pas trop naze XD))

Et le levé de coude…

Il m’a l’air compréhensif, demande lui plutôt de viser les genoux.

Je… j’sais pas

Je… j’vois pas de quoi… j’vois pas du tout de quoi tu veux parler…

Enfin si, pour l’incendie mais… personne m’a parlé de toi pendant la… l’enquête de l’autre jour. Je… j’savais pas qu’on t’avais convoqué aussi… j’sais pas grand-chose en fait…

Les yeux de lynx de l’homme demeuraient fixés sur son vis-à-vis, bien moins embués par l’alcool lorsqu’ils fixaient un point avec autant d’intensité et d’attention. C’était comme si le nordique s’était figé dans le temps tellement il concentrait toutes ses forces sur la tâche de scruter l’autre avec la vigilance d’un chat guettant un merle au loin. Un merle inaccessible, mais tout de même d’un grand intérêt. L’américain assis le verre à la main n’avait pourtant pas fière allure : il ne le regardait pratiquement pas, relevant ses yeux que brièvement, de sombres billes fuyantes ne croisant jamais celle de David.

Sa première question provoqua cependant une réaction visible pour l’hôte : Logan parut retenir son souffle avant de terminer d’une traite son verre de bourbon. Il irradiait tellement de crainte et de méfiance que David se redressa légèrement un instant, comme sonné par la démonstration de tant de sentiments et de détresse étranges au son de ses quelques mots. Il ne menaça pourtant pas l’autre, ni verbalement ni d’un couteau Bowie non plus !

L’expression gardée à l’extrême de Redd, son alcool but d’un coup… L’esprit d’Handel fut envahi un instant d’inquiétude face à l’état d’esprit de son invité, sur la cause possible de tels comportements. L’autre avait-il posé un geste si horrible ? L’employé de ferme avait-il une réputation si sombre sans même en être informé?

Sans même savoir ce qu’il aurait dit de toute façon, David ouvrit la bouche plusieurs fois comme pour parler, mais la referma à chaque coup sans que ne sorte le moindre son, le nordique se contentant finalement de froncer les sourcils lorsque l’autre sembla vouloir prendre la parole.

Logan ne savait rien. David sentit ses épaules s’affaisser par la déception. Pourtant, une demi seconde après, ce n’était plus ce qu’il ressentait et il reprit bien vite sa posture dominante tout en s’assombrissant : non, cela ne pouvait être une fausse piste, il refusait d’y croire. Avec l’inspectrice lui affirmant que Westwick ne pouvait confirmer son alibi alors que les deux hommes passèrent presque toute la soirée ensemble lors de la séance cinéma, et deux Redd rodant autour du poste à ce moment, Logan devait y être pour quelque chose. Si on avait manipulé les dépositions ou les témoins, cela ne pouvait être qu’un Redd… Qui d’autre le détestait assez pour tenter de le faire accuser à tort dans un enquête aussi sérieuse?

Logan Redd mentait à coup sûr, et cette conviction provoquait d’autant plus David. Sachant cela, il devait maintenant trouver une façon de le prouver.

« Pas grand-chose ? Qu’est-ce que ‘pas grand-chose’ veut dire, qu’est-ce que… »

Handel s’interrompit, réalisant qu’il eut haussé le ton de quelques octaves, ton qu’il n’utilisait que lorsqu’il désirait parler à William alors que le bruit des machineries agricoles enterraient sa voix. Il inspira et expira longuement, cherchant à retrouver son sang-froid et sa patience, prenant place lentement sur la chaise face à son invité à la vue de l’air que l’autre affichait. Lorsqu’il reprit la parole, sa voix était à nouveau neutre et stable, ses mains posées à plat sur la table devant lui comme pour montrer qu’il n’avait pas d’arme ou d’intentions violents pour l’instant.

Toute mes excuses, c’est seulement que je n’arrive pas vraiment à comprendre : pourquoi ais-je l’impression du contraire? Non pas que je te traite de menteur, mais il y a toujours la possibilité que tu agisses par nécessité, contraint par quoi que ce soit… » Il marqua une pause cherchant les mots justes pour amadouer le natif de Grayson : « Je ne cherche pas de coupable ni réparation, je veux seulement connaitre la vérité. C’est tout ce que je cherche. Après tout, avec tous ces incidents curieux en ville, j’ai au moins le droit de savoir ce qui me concerne… Handel mentit en partie, puis poursuivi en guettant les réactions de son interlocuteur : « J’ai été forcé de quitter mon poste plusieurs fois le soir de la représentation et de l’incendie, cela me plaçant donc hors de vue pour la plupart des habitants de ce village. Quelqu’un aurait profité de cette situation pour pousser les enquêteurs à croire que cela faisait de moi un suspect en quelque sorte. En toute honnêteté, tu ne sais vraiment rien à ce sujet ? »

C’est d’moi que tu parle là ?... démerde-toi Logan t’es grand…

Mon cousin, il pense que c’est Aidan Donnelly qui a fais cramer le truc…

Tu vois quand tu veux.

Moi… j’pense pas que ce soit lui … enfin, j’ai pas vraiment d’idée en fait… mais c’est vrai qu’il a dit qu’il allait tuer tout le monde… juste après avoir tapé sur mon cousin, quand on montait la piscine...

Aidan Donelly ? Ce simple mot fit soudainement l’effet d’une bise glaciale au cœur du canadien, ce dernier se recula dans sa chaise pour s’adosser profondément, comme si l’implication de la réponse de Logan était telle qu’elle poussait David à avoir un mouvement de recul. Il ne dit rien, laissant le Redd poursuivre au sujet du blondinet, laissant ses paroles s’infiltrer dans son cerveau malgré le fait que son regard détourné fixait le vide d’un air presque égaré. Tout semblait coller soudainement et violemment dans l’esprit de l’employé de ferme, et il se maudit presque d’avoir cru un instant que Aidan pouvait être innocent, qu’il fut seulement au mauvais endroit au mauvais moment.
Après tout, Casey, la sœur de Joshua Ferguson elle-même s’en méfiait, et il y avait cette histoire de menace de mort envers toute la ville, des rumeurs au sujet de possibles sauts d’humeur du garçon… Par-dessus tout sa présence fortuite dans les épais bosquets le soir de l’incendie, présence que David préféra taire dans le but de mener l’enquête lui-même sur le moment. Mais s’il avait su qu’il allait couvrir un pyromane homicidaire ou presque plutôt qu’un simple témoin clé, jamais il n’aurait pris la peine de mentir au visage du shérif et de l’inspectrice ! Maintenant il était pratiquement le complice de ce qui pouvait même être une tentative de meurtre…

C’est vrai que le cadet eut l’air étrange ce soir là : il ne cessait de regarder par-dessus son épaule et paraissait presque soulagé à l’idée de terminer leur petite rencontre surprise. Il ne le remarqua pas alors, mais tout ceci était affreusement suspect.

« Le plus jeune des Donelly...

David fit écho avec un certain retard, pas vraiment une question, seulement les mots pour le dire. Il faisait de son mieux pour garder son ton neutre et détaché, pour cacher la vague de colère qui le regagnait à l’idée qu’on l’ait trahi ou plutôt qu’on se soit joué de lui à son insu. Il tendit la main vers la bouteille à son tour avec l’intention de se resservir, réalisant distraitement qu’il n’avait pas de verre. Il la reposa sans faire de cas, l’esprit trop troublé par mille autres questions pour en être dérangé.

Pourquoi ? Pourquoi Aidan voudrait brûler quoi que ce soit? Pour se venger? Pour se révolter du train de vie trop tranquille et trop étouffant des habitants du village? Ou alors avait-il appris quelque chose qu’il ne devait pas et s’était depuis lancé dans une vendetta personnelle?... Son regard trouva le visage de Logan presque frénétiquement, les yeux plissé comme si cela l’aiderait à voir plus clair dans cette affaire. Si seulement l’alcool ne lui embrouillait pas l’esprit, et en même temps, David ressentait de plus en plus le besoin de se resservir, et tant pis si ce serait à même le goulot.

« Ton cousin, il t’a spécifié ce qui lui faisait croire qu’Aidan puisse faire une telle chose ? S’il avait tenté une… une mauvaise plaisanterie envers Nathaniel c’aurait été compréhensible, mais contre la cabine ou contre le jeune Ferguson… »

Handel demanda presque avidement, fronçant des sourcils avec force. Rien ne semblait faire de sens, et son investigation sur un phénomène divergeant de l’incendie et de sa cause venait tout juste d’être oubliée maintenant qu’une avancée dans son autre enquête maison en cours lui tombait directement sous le nez

Putain ! Le con avait mordu ! Trop bien !
Enfin mordu… non, on n’en n’était pas encore là, mais quelque chose soufflait à Logan qu’il fallait continuer de taper sur le même clou.

Coupable. Je sais, t’ai dis de te démerder mais,… j’peux juste pas m’empêcher de m’en mêler !

Tant mieux. L’esprit du jeune homme fonctionnait mieux lorsque son taux d’adrénaline était moins haut. L’alcool, il avait l’habitude de gérer, il était tellement souvent saoul qu’il avait même parfois l’impression de gérer mieux sa vie totalement bourré que sobre. Mais là n’était pas la question. Il était surtout près à dire et faire n’importe quoi à n’importe qui pour ne pas être montré du doigts, et pour ne pas qu’on frappe sur les siens…

Il n’avait pas participé à cette histoire d’incendie, et il n’avait pas envie d’en subir les conséquences comme ça avait été le cas avec le saccage de la maison des Donnelly. Il s’était fait accusé à la place de Kathleen, pour la préserver de ce genre de désagrément justement. Il ne regrettait pas son geste, même si depuis, il n’avait pas arrêté d’en baver une seconde. Si la vapeur pouvait s’inverser rien qu’un tout petit peu, c’était franchement bienvenue.

Surtout que porter les soupçons sur un innocent ne le gênait absolument pas du tout si cet innocent en question était ce petit foireux d’Aidan Donnelly. Cette petite raclure avait sauté sur son cousin dans l’intention de lui casser la gueule, et Logan avait été forcé d’intervenir ! Pourtant il avait payé le prix fort d’avoir osé levé la main sur le cadet de la fratrie. Le grand frère était venu lui faire sa fête… et quelle fête ! Il avait cru mourir.
Pour tout ça, Logan se réjouissait de pouvoir pourrir encore un peu leur piètre réputation.

Mais il devait le faire intelligemment, ne pas se laisser bouffer par ses angoisses et s’inspirer de Nathaniel. Son cousin gardait un sang froid de serpent même dans les situations les plus inextricables. Comment faisait-il ? Mystère. Logan n’avait pas ce talent, mais il pouvait au moins tenter le coup.

« Hum… beh Nathaniel m’en a pas dit grand-chose… il aime pas trop parler de… de toute cette histoire avec les Donnelly. Mais d’après c’que j’ai compris… ils auraient fait ça pour qu’on pense que… beh que c’est nous quoi… enfin… plus mon cousin en fait »

S’inclure n’était jamais une bonne idée si l’on voulait s’extirper du problème.
Bref, il avait pondu ça comme ça, et il était pas mal fier de lui. Si l’on creusait un peu, l’histoire tenait un peu moins bien la route, mais que pouvait-il répondre d’autre ?

« Enfin ça… c’est c’que croit Nath… moi j’en sais rien. J’étais pas là quand ça a prit feu… mais si c’est vrai, ça expliquerait pourquoi son grand frère m’a cassé la gueule »

Était-il allé trop loin ? Est-ce qu’il en disait trop ?
Difficile à dire. Difficile de savoir où se positionnait David face à tout ça. Que savait-il de toute cette affaire ? Quels échos en avait-il reçu ? Dans quel camp se trouvait-il ? A quel degré connaissait-il les Donnelly. Après tout il avait passé quelques jours dans leur maison pour les réparations … les réparations des dégâts qu’il était sensé avoir commit d’ailleurs…

Tendu, il guetta donc la réaction de son interlocuteur, ses yeux sombres déviants à plusieurs reprises sur la bouteille.

David garda son regard rivé sur l’autre homme les premiers instants, bien qu’il fini bien assez tôt par détourner pensivement les yeux, laissant les informations déversées à flots incertains infiltrer son esprit et y tourbillonner. Que Aidan ait manigancé tout cela pour faire accuser Nathaniel sembla être une idée bien saugrenue, principalement de par la complexité et la nature d’un tel plan : le jeune homme aurait combiné une telle chose tout seul, conçu un plan servant à faire incriminer quelqu’un d’autre sans le moindre scrupule? Pourtant le cadet Donelly lui apparaissait plutôt comme quelqu’un d’un peu impulsif peut-être, à son âge c’était presque normal surtout considérant le fait qu’il venait à peine de devenir orphelin, probablement soudainement placé sous le gardiennage de membres de sa famille jusque là ayant toujours été que des frères, pas des pères pour lui… Ça David pouvait le comprendre, il pouvait s’imaginer cette frustration poussant n’importe quel garçon à se battre quand on le provoque, mais imaginer un Aidan aussi machiavélique, aussi manipulateur et retors?…

Quoique : connaissait-il vraiment le blondinet? Il n’avait fait que le croiser brièvement à quelques reprises ou entendre la mention de son nom dans de rares conversations avec d’autres habitants de Grayson. Et les fois où il avait fait directement incursion chez les Donelly pour aider aux réparations dans la vieille demeure qu’ils habitaient, Aidan lui était à la ferme pour le remplacer : ses timides relations avec le clan d’étrangers excluaient donc presque toujours le plus jeune.

Pourtant, d’un autre côté, David était-il prêt à croire les dires du clan des Redd? Et si c’était justement le contraire, que Nathaniel tentait de faire accuser Aidan à sa place? Cela lui ressemblait beaucoup plus de manipuler l’opinion publique, et si un des frère Donelly décida de donner une raclée à Logan, peut-être était-ce parce qu’ils avaient découvert la supercherie des deux Redd avant qu’ils ne réussissent à éventer la rumeur des plans secrets d’Aidan…

David reposa son regard de lynx plus du tout embrouillé par l’alcool –bien qu’encore dans son système- sur son invité, tentant de le jauger, cherchant qui des deux familles croire, qui des témoins méritait le plus de confiance. Pourtant il demeura ainsi, un air de méfiance au visage, pendant de longues secondes, absolument incapable de prendre le côté un ou l’autre des partis. Comment pouvait-il démêler la vérité des mensonges autant de mise dans cette pauvre ville perdue du Missouri? Devrait-il tenter de coincer Logan et le faire se contredire si supercherie il y a, ou serait-ce inutile s’il ne faisait que reprendre les propos d’un autre?

L’homme du nord baissa la tête et se pinça l’arrête du nez en poussant un soupir. Ce qu’il lui fallait, c’était un sérum de vérité, un truc infaillible qu’il n’aurait qu’à vaporiser aux visages des gens pour les entendre révéler tous leurs plus sombres secrets s’il le désirait… David chassa cette pensée stupide, mais su qu’il pouvait cependant se contenter d’un sérum un peu moins efficace : il se saisit de la bouteille, en versa un verre généreux à Logan et alla s’en chercher un lui aussi dans l’armoire de cuisine avant de le remplir tout autant sans dire un mot.

Cependant, en voulant reposer le Jim Beam sur la table, distrait par son trouble et sa frustration devant son impuissance, un peu embrouillé par ses rations précédentes, Handel échappa le contenant sur les derniers centimètres. La bouteille fit un léger rebond qui eut pour effet de déplacer son centre de gravité et de la faire basculer : elle se renversa sur le côté, laissant tout ce qui restait du liquide ambré se déverser sur la table et éclabousser sa chemise.

« Saleté!... »

David grogna entre ses dents, effectuant un mouvement de recul assez gauche et assurément trop tard pour tenter d’éviter le dégât et les éclaboussures. Il lança un regard fortement agacé mais aussi quelque peu désolé sur tout le liquide gaspillé et la bouteille désormais à sec, sur les deux verres restants paraissant presque à moitié vide maintenant. Il jeta un rapide coup d’œil à sa montre : était-il trop tard pour aller en ville se procurer une autre bouteille? Le petit bar improvisé du drugstore devait sûrement être encore ouvert sinon, il pourrait y amener l’autre et poursuivre…

« On dirait qu’après ce verre, nous allons devoir nous déplacer en ville… David sous-entendit avec une touche d’impatience dans sa voix, avant de prendre une longue gorgée de ce qui lui restait

Ca m’arrive tout le temps

…Tu vas me ramener chez moi ?

C’est fort ton truc

« …Tu vas me ramener chez moi ? »

Reposant le chiffon qu’il eut attrapé pour limiter les dégâts de l’alcool renversé, David ressentit un envie irrésistible de s’exclamer avec perplexité et mépris à cette interrogation : il était hors de question qu’il laisse tomber l’affaire et rate sa chance de soutirer tout ce qu’il pouvait du Redd qu’il hébergeait depuis quelques minutes. Il avait d’ailleurs l’impression que c’était déjà bien assez longtemps, comme si la présence de l’autre de cette lignée pouvait entacher son petit espace personnel.
David chassa cette pensée déraisonnable, mais ne put s’empêcher d’afficher une moue quelque peu sombre alors qu’il fixait Logan en train de remonter son pantalon sans grande classe.
Il ressentit une légère satisfaction en le voyant grimacer, bien que pour l’instant il ne savait si ces blessures furent méritées ou non. Il ne savait toujours pas qui croire après tout. Réalisant cependant que son invité avait l’esprit bien empli de l’idée de retourner chez soi en passager choyé à bord du camion de l’employé de ferme, Handel fut pris de ce sentiment d’injustice, ce besoin de corriger l’erreur de Logan au plus vite. Il s’empressa de noter quelque peu sèchement, tout en essuyant avec lenteur ses mains sur ses propres jeans :

«Je ne vois pas pourquoi tu voudrais en finir aussi rapidement avec cette soirée. Je prévoyais plutôt aller prendre un verre ou deux au Drugstore plutôt, vu le fait que je n’ai plus rien d’assez fort à boire chez moi… »

Un silence de mort s’est installé, pas même brisé par les cris des criquets et autres créatures qui auraient habituellement chanté en cœur dans une campagne du genre par un été si chaud. Cette partie de Grayson semblait toujours dénuée de faune en réalité. Logan hésitait, n’est-ce pas? Cela voulait dire qu’il cachait effectivement quelque chose, cru David, renforcé dans cette hargne et cet acharnement contre l’autre par ces convictions. Voir l’autre hésiter –parce que David comprit que ce blanc fut peut-être causé par la réticence de Logan- il ajouta quelques incitatifs en tentant de prendre un ton un peu plus avenant malgré ses humeurs changeantes sous l’effet de l’alcool :

«Ce sera moi qui paye, on en convient, puisque c’est moi qui invite après tout.»

Sans attendre de réponse, David se dirigea vers sa porte –évitant de son mieux de marcher en zigzag-, passa devant Redd et ouvrit la porte pour lui, la tenant ouverte tout en lui adressant des regards insistants presque sévères.

((ooc: uuh... bah désolée du temps d'attente pour une minable réponse comme celle-là .__. ))

Quoi ? Allez boire un verre au Drugstore avec David Handel ?
Généralement, aller boire un verre là-bas ne le dérangeait jamais et il y passait bon nombre de soirées, rivé au bar, à enquiquiner Calvin, le propriétaire de l’endroit, avec ses histoires d’homme saoul et ses ricanements intempestifs. Ce gros râleur passait son temps à lui dire qu’il était insupportable et à le menacer de le mettre dehors s’il faisait trop de bruit ou cassait un verre. Et le passe-temps favori de Logan était d’essayer de lui décrocher un sourire. Au moins un seul sur la soirée. Parfois il parvenait à ses fins, parfois il finissait effectivement dehors. Au fond Logan était certain que Calvin devait l’apprécier, du moins en quelque sorte. En tout cas il était l’un de ses meilleurs clients, ça c’était une information vérifiée.
Alors dans le principe, s’y retrouver autour d’un verre lui plaisait. Seulement dans ce cas précis, il y avait quelque chose dans le ton et dans le regard de David qui l’empêchait de se sentir en confiance. Au moins, ils ne seraient plus seuls en tête à tête et Logan pourrait sans doute arrêter de craindre les coups, mais il détestait cette impression de ne pas avoir le choix. D’être obligé de le suivre et de ne pas avoir son mot à dire à propos de ça.

Qu’est-ce qu’il lui voulait à la fin ? Il lui avait posé ses putains de questions et Logan lui avait répondu docilement, sans faire d’histoires. Pourquoi refusait-il de simplement le ramener chez lui et de le laisser tranquille ? Où voulait-il en venir ? Avait-il réellement une idée précise derrière la tête ou simplement une manière d’inviter les gens qui leur donnait l’impression d’être en plein kidnapping ?
Logan se fichait pas mal qu’il paye ou pas. Il n’avait pas de problème d’argent, même si oui, techniquement il n’avait pas un rond sur lui. Ca n’était jamais un problème, il avait une ardoise des crédits rien que pour lui au drugstore. M’enfin bref, vu le regard que lui lançait David, il avait l’air d’y tenir, et Logan dut se forcer pour hocher la tête à l’affirmative avant de quitter la cuisine pour ressortir à l’air libre.

Une fois dehors, et tandis que dans son dos, David verrouillait sans doute sa porte, le jeune comptable se permit de lever ses deux billes sombres en direction du ciel étoilé dans un soupir étouffé. Il passa deux mains lasses sur son visage tuméfié, et prolongea le mouvement pour remettre en arrière ses longues mèches de cheveux noirs. Comment allait-il faire pour se sortir de cette situation ?
Il entendit les pas de David s’élever dans son dos et Logan se retourna pour le voir marcher vers son truck garé un peu plus loin. Logan lui emboita simplement le pas en lançant tout un tas de regard alentours, et quelques instants plus tard, il était installé sur la place passager à l’avant du véhicule tandis que le propriétaire démarrait le moteur dans un vrombissement sonore.

« Mais qu’est-ce que je fou là ? » c’était la question qui lui revenait sans cesse en tête. « Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce qu’il veut ? »

« A mon avis… j’pourrai pas rester trop longtemps parce que… demain je boss et qu’il est déjà tard » précisa-t-il alors que l’auto se mettait en branle et s’engageait sur le chemin.

Peut-être que comme ça, le fermier comprendrait qu’il n’était pas plus emballé que ça par l’idée et changerait d’avis en cours de route… ? Ou pas…
Logan ne cessait de lui jeter de bref coup d’œil en biais, les mains posées sur ses cuisses fautes de savoir quoi en faire d’autre. Cette soirée était définitivement trop bizarre…

Cela dit, une fois qu’ils eurent quitté le chemin terreux qui menait dans cette partie reculée du village, Logan se sentit un brin plus léger. S’éloigner de la maison des Black lui convenait parfaitement. Ils passèrent bientôt non loin de la ferme des Ferguson et puis à travers un morceau de forêt pour regagner la route principal qui traversait Grayson.

« ‘comprend pas comment tu fais pour vivre dans c’coin-là » marmonna Logan, ses yeux rivés au décors forestier qui défilait par la fenêtre et le par-brise.

[ooc : mdr si on t'écoutais, tous tes posts seraient à jeter à la poubelle lol t'inquiète donc pas autant !]

Bien que les alentours fussent loin de présenter des cambrioleurs à en revendre, David n’oublia pas de verrouiller sa porte et de bien la refermer cette fois, ces gestes lui permettant de laisser à Logan le temps de le dépasser. Non pas que l’employé de ferme s’attendait à ce que son invité décide de se sauver à la course ou d’extirper de nulle part une arme quelconque, mais l’esprit d’Handel, embrouillé et subissant les effets de diverses tensions depuis trop longtemps, ne pouvait que se laisser aller à la méfiance frôlant la paranoïa. Il devait garder le contrôle de la situation, cette pensée de plus en plus vraie à son avis au fur et à mesure que Logan sera acculer dans un coin. Alors, soit l’homme aux cheveux longs avouera tout sur ce qui se trame ou se manigance, soit il réagirait aussi imprévisiblement et extrêmement qu’un animal sauvage blessé et pris dans les pièges d’un chasseur.

Il prit les devant ensuite pour se rendre du côté passager de son véhicule et déverrouiller la portière, regrettant presque de ne pas posséder le mécanisme de sécurité désigné pour empêcher les enfants d’ouvrir la porte de l’intérieur, et donc de sortir lorsque le véhicule est en marche ou sans que le parent ait ouvert de l’extérieur.
Ignorant promptement tout ce qu’il savait au sujet de l’ivresse au volant, David démarra sans un mot et mis les gaz, ne laissant aucune réaction gagner son visage lorsque Logan l’informa du fait qu’il avait à faire le lendemain.

« La situation est semblable pour moi aussi : je dois me lever à l’aube pratiquement tous les jours… Mais si ce n’est que pour cette fois, je ne vois pas le problème. »

À ses côtés, Logan semblait nerveux, un signe encourageant pour les théories de Handel. L’homme du Nord apercevait justement, de temps en temps lorsqu’il jetait un coup d’œil sur les arbres bordant la route, un regard méfiant de la part de l’autre.
Mais Redd finit par reporter son attention et commenter sur les lieux, chose qui arracha une exclamation mi-dédaigneuse, mi-amusée mi-perplexe à David. Il jeta un long regard à son passager, attendant que l’autre revienne sur ses mots ou exprime quoi que ce soit indiquant qu’il mentit au sujet de ses sentiments sur cette partie de la ville, bien que Logan parut plus confus qu’embarrassé d’être démasqué.
Encore plus amusé par l’ironie de la situation, l’employé des Ferguson reposa ses yeux pâle sur la route et prit la parole sur un ton presque narquois:

« Tu as lu le Prométhée Moderne, connu sous le titre Frankenstein, par Mary Shelley? » Il scruta Logan une fois de plus, ce dernier n’émettant qu’un son rauque et vague en guise de réponse, ce qui poussa David à poursuivre avec la même insolence : « Évidemment… Le fait est que le roman est loin d’être à l’image de tous ces films qui ont suivis sur le même thème : la façon dont le docteur a ramené à la vie le monstre n’est pas même décrite, il n’y a pas de grands cris victorieux ou de servant difforme. Non, en réalité, plus de la moitié du volume du texte sert à décrire l’horreur et la déchéance nerveuse du créateur à partir du moment où il réalise qu’il a malencontreusement apporté sur cette terre un être infernal, et que par extension il est responsable de toutes les abominations que la chose a commise une fois relâchée dans la nature… L’esprit du docteur est si dérangé par l’effroi et les remords, par tous ses proches et ces gens éliminés par la chose, qu’il en vient même par craindre le moindre endroit où la chose pourrait être aperçue pendant un bon moment.
Je te garde de la fin, mais il faut avouer que l’aspect psychologique de l’histoire est des plus intéressants »

David marqua une pause le temps de donner un coup de volant pour éviter un fossé qui se rapprochait un peu trop à son goût –l’alcool dans son sang rendant les lignes droites aussi difficiles à accomplir au volant qu’à pied- puis ajouta innocemment bien qu’avec un regard entendu:

« Étrangement, ce coin-là ne m’effarouche pas autant. »

((ooc: hum, j'sais pas han? Désolé pour l'affreuse attente <_<))

It’s alive !! AAALIIIIVVEE !!

… ouais

Pourquoi ce jeune homme devait-il demeurer si peu bavard? Ou alors est-ce que ce peu de réponse signifiait au contrairement énormément sur la situation? Était-il sec et bref parce que la référence choc l’eut interpellé ou parce qu’il n’en savait rien et tentait de taire ces allégories au plus vite? David eut tenté tant bien que mal de déchiffrer les vagues marmonnements de Logan pendant le reste du trajet, mais le seul consensus que son esprit embrouillé trouvait était celui que le Redd lui cachait quelque chose.

Mais quoi justement, le tançait la part encore rationnelle de son cerveau, que lui cachait-il exactement, mis à part quelques sombres affaires que David connaissait déjà. Un retour à la case départ qui le lançait d’autant plus frustré, il dut admettre, mais ne put poursuivre sa réflexion plus longtemps : le passager sembla changer d’attitude alors que devant eux se profilait le Drugstore dans toute sa splendeur. David ne put que dénicher une place de stationnement à proximité et se résoudre à exécuter cette part de plan –qui d’ailleurs ne lui semblait plus aussi brillante tout à coup.

Il suivit Logan tel un fauve surveillant sa proie jusqu’au bâtiment, bien que l’autre ecchymosé ne semblait pas vouloir s’enfuir au final. Les deux hommes pénétrèrent l’endroit et le Redd s’empressa de se mettre à son aise, avançant déjà en saluant le barman. Le fermier retint son souffle lorsqu’il réalisa que l’autre semblait vouloir se diriger vers le comptoir, là où il n’y aurait plus aucune chance de le confronter en solitaire. L’homme au bar allait épier toute leurs conversations, ou du moins risquait d’entendre suffisamment de bribes pour tout faire foirer. Sans parler que ce manipulateur de Redd aurait de quoi éviter tout sujet sérieux.

‘’Ne serait-ce pas mieux de se tenir à l’écart histoire d’avoir droit à un peu de calme? Étant en plus les seuls clients de la section bar en plus…’’

David souffla entre ses dents à l’intention de l’autre, tentant de cacher la raideur de son ton et de ses gestes tant bien quel mal.
Logan se contenta seulement de marmonner quelques chose voulant vaguement dire qu’il avait envie de voir Calvin et qu’être plus proche du bar accélérait le service. Le cadet s’empressa sur le coup de se rendre au bar et prendre place avec la précaution que ses blessures exigeaient.

Handel demeura figé sur place quelques instant, la colère se répandant en lui tel un poison exotique et fatal. Tout allait pour le pis, tous ses plans étaient contrés ou déflectés à chaque fois qu’il croyait pouvoir prendre le dessus. L’homme serra des poings et des dents de plus belle, mais stoppa net lorsqu’il réalisa que le barman lui jetait ce qui ressemblait à un regard perplexe.
Soucieux de ne pas attirer encore plus l’attention, Handel alla rejoindre son invité au comptoir et prit lentement place, cachant de son mieux la colère sourde qui le rongeait de l’intérieur.

((ooc: hum voilà... Worth the wait? J'crois pas, désolée Neutral

))

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